Dès les premières cases on est séduits par cette fluidité narrative et ce sens du découpage qui firent les belles heures de Clifton dans les années 1990. Nous voilà embarqués en plein Moyen Âge, du temps des querelles de trônes, des légendes ancestrales et des combats d’épée.
Le roi Arthmel vient de mourir. Empoisonné. Le coupable serait-il la princesse Hélia, sa plus jeune fille ? Le prince Oghor, héritier mal léché, en est convaincu. Ça l’arrange bien, tiens. Cette gamine est plus populaire que lui. D’ailleurs, la Pyrise, une pierre magique, semble elle aussi désigner la jeune fille coupable. Bien décidée à prouver son innocence, Hélia s’évade et part vers Kohrmor, la terre des dragons, où un immense danger semble sur le point de se réveiller…
40 ans après Hugo, Bédu revient à la Fantasy. On y retrouve son talent ineffable pour croquer tout un bestiaire improbable et sympathique. Il y a les « Khtolls », petites créatures poilues à mi-chemin entre le troll et la gargouille, et qui – excusez du peu – baragouinent le vieux françois, mais aussi les « Draks », de gros lézards verts volant en armure. Leur chef, vêtu d’une toge noire et d’un grand manteau rouge, semble tout droit sorti d’un animé nanar des années 1980. Et c’est terriblement plaisant ! Car SangDragon, c’est un peu comme si Johan et Pirlouit avait rencontré Frank Frazetta !
C’est aussi rafraîchissant de voir qu’une ligne franco-belge plus classique a encore toute sa place chez un grand éditeur dans un récit jeunesse neuf et audacieux, plus que dans une énième reprise de séries patrimoniales. Notons au passage les qualités graphiques de la couverture, d’un beau rouge flamboyant qui devrait bien ressortir dans les vitrines des librairies.
À l’intérieur de l’album, les teintes chaudes du studio Cerise sentent le soufre et le souffle de dragon, mais c’est un peu sage, presque terne. On aurait rêvé d’une direction artistique plus assumée, plus contrastée. Enfin, n’est pas E. P. Jacobs qui veut…
(par Bérengère HALLIER)
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SangDragon - Par Bédu - Ed. Dupuis