Voici le premier manga édité de Yoann Vornière qui a précédemment travaillé avec Jim Bisho sur la BD Jill & Sherlock. Silence édité chez Kana est prévu en quatre tomes.
Depuis de nombreuses années, le monde est plongé dans l’obscurité et les monstres pourchassent les humains. Le moindre bruit les attire. C’est dans ces conditions que Lame et son village tentent de survivre cachés dans une église. Malheureusement, les ressources se font de plus en plus rares.
Parmi les inspirations, il faut citer le célèbre tableau de Vincent van GoghLa Nuit étoilée. Celui-ci a servi pour la création du ciel dans Silence. La première fois que le lecteur voit le monde extérieur, il est confronté à ce ciel à la fois magnifique et pesant qui reflète l’ambiance de cet univers.
Aussi, une des particularités majeures de l’intrigue est la présence du folklore français dans toute l’histoire. Les différents monstres croisés en sont inspirés, notamment la souris verte ou l’esprit chantant. Ce choix n’est pas du tout habituel dans les mangas ce qui en fait une force ici. Le lectorat français pourra donc découvrir ou redécouvrir des créatures iconiques françaises.
D’ailleurs, l’aspect des monstres parvient à être horrifique et menaçant. Leur mode opératoire est également une source de terreur. Pour le cas de la petite souris à dents, elle s’accroche à sa proie pour lui arracher les dents et s’en faire des ornements, de quoi être effrayé avant même de croiser la souris.
Même si les créatures ne sont pas toujours terrifiantes au premier abord, elles le deviennent par la suite. Par exemple, les esprits chantants sont plutôt inoffensifs lorsqu’on les voit, mais il suffit de leur répondre pour qu’ils changent et attaquent.
D’autre part, l’utilisation du langage des signes comme principal moyen de communication du village est pertinente, avec la menace que représente le bruit qui attire les monstres. Chaque case où un personnage parle dans cette langue, se traduit par le dessin d’un signe dont la signification reflète ce que dit le personnage. Avoir choisi d’illustrer ce langage en dessinant à chaque fois un seul signe permet une fluidité et une lisibilité qui n’auraient pas été possibles en transcrivant tous les signes d’une discussion.
Par contre, la construction des personnages est plutôt classique. Par exemple, Lame est un jeune héros à l’esprit shônen comme on en voit beaucoup (Deku de My Hero Academia, Dai de Dragon Quest - La quête de Dai...) avec une certaine naïveté et joie de vivre.
Enfin, le style graphique diffère par moment en fonction de qui raconte l’histoire. Cette idée met en avant des points de vue variés et permet de mieux comprendre la façon de vivre un instant selon un personnage précis. Ainsi, Lame, qui est doué pour raconter des histoires, va décrire Lune comme une femme avec beaucoup de clochettes ce qui va émerveiller les enfants.
Ce tome introductif nous dévoile un monde hostile aux humains, dont le climat est très bien retranscrit à travers le dessin (les monstres, les expressions des personnages, les paysages) et les obstacles rencontrés par les personnages. La situation désespérée dans laquelle se trouve le groupe que nous suivons semble difficile à résoudre ce qui donne envie de lire la suite pour connaître l’évolution. Le mélange de styles graphiques ajoute également du charme à l’histoire.
(par Malgorzata Natanek)
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