Nous ne nous attarderons pas sur son travail critique, éclectique et original, qui va d’une biographie de Guy Debord, la figure du mouvement situationniste auteur de La Société du spectacle, à la traduction française du Manifeste contre la société industrielle (1996) de Theodore Kaczynski (Unabomber), à une biographie de Louis XIV, Le Roi-Machine, mettant en perspective un règne au spectacle bien huilé. Il est également l’auteur d’un roman graphique qu’il a écrit pour le dessinateur québécois Luc Giard, une sorte de conte au dessin proche de l’art brut : Konoshiko (Les impressions nouvelles, 2012)
On lui doit essentiellement quatre ouvrages sur Tintin : Les Métamorphoses de Tintin (Seghers, 1984 ; Flammarion, « Champs », 2006) ; Tintin et le mythe du surenfant (Moulinsart, 2003) ; L’Archipel Tintin, où il intervient dans un collectif (Les Impressions nouvelles, 2004) ; Dans la peau de Tintin (Les Impressions nouvelles, 2010) et Lettre à Hergé (Les Impressions nouvelles, 2013).
Le premier est l’une des premières études critiques du corpus du héros hergéen dans l’ensemble de ses albums dont il étudie l’évolution politique et morale sur une ligne du temps. Ce faisant, il interroge le héros bien au-delà des truismes habituels de la critique (ses opinions politiques, son rapport avec les femmes…), dressant un portrait existentiel du héros en quelque sorte.
Dans le second, le plus important peut-être, Tintin et le mythe du surenfant, où il caractérise Tintin comme « un mythe réconciliatoire » de l’entre-deux-guerres : « Sa fonction implicite est de ressouder entre deux générations une confiance brisée depuis la guerre 14/18. Sans l’avoir clairement décidé, Hergé a donc forgé un mythe nouveau, caractéristique du XXe siècle, auquel je donne le nom de surenfant. »
Dans la peau de Tintin s’appuie davantage sur la biographie d’Hergé pour définir « la peau de Tintin » dans laquelle se glisse chaque lecteur, achevant la démonstration par un pamphlet contre des ayants droit de Tintin « mal dans leur peau » retournant contre le héros le dépit que génère en eux un rôle qui les dépasse.
Enfin, dans Lettre à Hergé, il prolonge, dans une adresse au créateur de Tintin, son analyse sur les ressorts mythiques d’un personnage qui, grâce au film de Spielberg par exemple, passe à de nouvelles générations de lecteurs, « une bonne nouvelle » selon lui.
En nous quittant, Jean-Marie Apostolidès va rejoindre dans les limbes de l’au-delà celui qu’il appelait son « ombre bienfaisante ». Il laisse, selon son éditeur Benoît Peeters, des textes inédits.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Photo : DR - Les Impressions nouvelles.
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