De son Texas natal, où elle a vu le jour en 1943, Janis Joplin, dite « Pearl », ne conserve pas grand chose : engoncée dans une famille plan-plan, complexée par ses kilos en trop, révoltée contre ses camarades de classes qui défendent encore l’esclavage, elle trouve refuge auprès de « tribus » : des bandes composées de gens un peu paumés, avec des fêlures qui la renvoient en miroir à ses propres blessures. Et aussi, très tôt, en chantant du blues et gospel ; cependant, sa propre mère l’assure : elle n’a « aucun talent » pour la chanson.
À l’université du Texas à Austin, son look et ses attitudes lui donnent le titre de « mec le plus laid du campus ». Humiliée, elle part pour San Francisco, où elle commence à fréquenter des lieux branchés où musiques, alcools, drogues et sexe vont de pair. Rangée durant un temps (elle est même fiancée !), elle se cherche encore à New York, avant de retourner vers l’Ouest, où le blues la rattrape. À San Francisco, elle intègre le groupe Big Brother and the Holding Company, qui la révèle. C’est le début d’un bref tourbillon de succès, fait d’excès, jusqu’à cette nuit du 4 octobre 1970, où elle est retrouvée sans vie.
Le récit proposé par Frédéric Bertocchini est chronologique. En voix-off, il est écrit à la première personne du singulier, comme si la chanteuse revenait d’outre-tombe sur son existence, en donnant quelques éléments qui éclairent ses blessures. De manière lucide, elle constate ainsi la concomitance entre une reconnaissance toujours grandissante – avec, pour point d’orgue, Woodstock en 1969 - et des addictions toujours plus fortes à ce qui la conduit à sa perte. Mais n’était-ce pas un mode de vie ?
Au dessin et à la couleur, Eric Puech propose un trait réaliste aux teintes pastel, ce qui est assez perturbant au départ, mais finalement colle bien à l’air de cette époque.
Déjà présent sur Le Horla, le duo d’auteurs porte un regard plein de tendresse sur Joplin, et propose en fin d’ouvrage quelques illustrations et photographies personnelles réalisées dans le domaine musical, ainsi que des photos personnelles rappelant qu’ils sont aussi des passionnés de musique.
(par Damien Boone)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.