À eux sept, ils forment la pire équipe d’enseignants de l’Éducation nationale. Pourtant, les Profs ont un défi à relever, permettre à la moitié de leurs élèves –en difficulté comme il se doit- d’obtenir leur baccalauréat en fin d’année.
À la fois réalisateur, scénariste et comédien, Pierre-François Martin-Laval a transposé les personnages et l’univers de la bande dessinée originale dans une intrigue qui rappellera aux anciens Les Sous-doués passent le bac, film de Claude Zidi sorti en 1980. Entre burlesque et situations surréalistes, une galerie de comédiens se déchaîne. Certains comme Isabelle Nanty , Stéfi Celma ou Raymond Bouchard -respectivement profs d’anglais, de français et de philosophie- adoptent de manière surprenante le physique de leurs modèles de papier. D’autres dont Kev Adams -l’idole de la série Soda sur M6- réussissent à incarner leur personnage par leur simple jeu. On surprendra au passage, un Christian Clavier à contre-emploi (ouf ?), avachi dans le rôle de l’enseignant flémard.
Dans le dossier de presse du film Pierre-François Martin-Laval -qui par ailleurs interprétait déjà le père de l’Élève Ducobu- confie le principe de départ de son film : "Que peut-on faire avec des personnages d’allumés pareils ? J’ai eu l’idée de les plonger dans un lycée où les choses vont mal : aux pires élèves, les pires profs !". Nul doute que l’ex Robin des bois ne réconciliera pas les intégristes du "bon goût" avec la bande dessinée de Pica et Erroc.
Il y a également fort à parier que la série ne se débarrassera pas d’une image de bande dessinée calibrée pour un éditeur, en l’occurrence Bamboo. Or les faits démentent le lieu commun. C’est le 23 décembre 1998 que le Journal de Mickey publie la première planche des Profs. Le dessinateur Pierre Tranchand, qui vient tout juste d’adopter le pseudonyme Pica et le scénariste Erroc –alias Gilles Corre- ont eu grand mal à imposer leur nouvelle série (voir notre interview).
Installées en Bourgogne, les éditions Bamboo n’ont alors que cinq albums à leur catalogue tous dessinés par Henry Jenfèvre et scénarisés par leur énergique patron Olivier Sulpice. Or, Olivier Sulpice est un admirateur de Pierre Tranchand. Quand il découvre Les Profs dans Mickey signé par Pica, il se dit : "Voilà un mec qui se fait passer pour Tranchand". Il sera le premier à déceler le potentiel de ces gags et n’aura de cesse de les publier en album. "À l’époque je doutais de mon avenir dans la BD, s’est remémoré Pierre Tranchand dans l’album 10 ans Bamboo. Comme on m’avait dit que mon dessin n’était pas vendeur, pour Les Profs, j’ai changé de nom afin de me faire passer pour un débutant. Quand Olivier Sulpice m’a contacté pour les publier en album, il m’a dit : "on va en vendre 30 000 exemplaires". Je me suis dit : "il plane. Si ça fait 8 000, c’est déjà bon.’""
Ce premier album est publié en juillet 2001. En janvier 2002, il obtient le Prix Alph’art jeunesse du Festival d’Angoulême. Les Profs restera dans les annales comme le premier succès populaire de la BD française apparu au 21ème siècle.
(par Laurent Melikian)
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