On vient de l’apprendre : Alors que cela avait été évoqué dans leur conférence de presse, Moulinsart ne présentera pas des images du film de Tintin par Spielberg et Jackson en avant-première lors du prochain Festival d’Angoulême fin janvier. Est-ce dû aux démêlés judiciaires de Moulinsart avec ses détracteurs ? C’est bien possible.
Si l’on en croit le site Internet Cinematical, citant le quotidien anglais The Telegraph, un appel au boycott du film de Spielberg & Jackson de la part de Bob Garcia [1] qui a recueilli plus de 500 posts de soutien sur Facebook, commence à sérieusement faire gamberger certains, outre-Atlantique.
Une autre affaire plombe encore davantage l’ambiance : la constitution en partie civile le 24 juillet 2007 par un citoyen congolais, M. Bienvenu Mondondo Mbutu contre Moulinsart du chef de « racisme, diffamation et xénophobie » à propos de l’œuvre Tintin au Congo créé en 1931. La plainte était instruite par le juge d’instruction bruxellois M. Claisse, toujours pas clôturée deux ans plus tard. On imagine que notre magistrat instructeur avait à mener une longue et harassante enquête exigeant d’interroger une longue liste de témoins et de compulser des quintaux d’archives…
Un peu énervé par cette diligence proprement namuroise, les avocats du plaignant ont formulé une requête près de la Cour d’appel de Bruxelles afin de statuer sur l’obstruction faite aux avocats du plaignant de consulter le dossier de l’instruction, ce que le juge leur avait refusé dans une ordonnance du 24 août 2009. La chambre des mises en accusation était amenée à statuer suite à une audience du 9 décembre 2009.
Dans ses réquisitions, l’avocat général M. P. Erauw rejetait la demande des avocats du plaignant. Il requérait les magistrats de la Chambre des mises en accusation de « déclarer l’appel de Mondondo MBUTU recevable mais non-fondé » et de confirmer l’ordonnance de rejet du juge.
Mais, malheurement pour lui, le 23 décembre 2009, la Chambre, constituée de trois magistrats indépendants, a décidé de ne pas suivre ses arguments et ordonna, au contraire, que la demande était « recevable et fondée », ouvrant l’accès au dossier pour les avocats de la partie civile.
Ces violents échanges juridiques sont ridicules. La partie va devenir désormais moins facile pour le juge qui va devoir clôturer l’instruction et trouver de solides arguments pour défendre l’album d’Hergé. En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas plus choqués qu’un citoyen interpelle le tribunal pour savoir si une œuvre est raciste ou non. On a vu récemment lors d’une émission de télévision où participait Michel Piccoli que les avis étaient partagés.
Il est clair que l’impact que cette affaire peut avoir sur l’opinion publique du pays de M. Obama, pimentée par les appels au boycott de Bob Garcia, rend urgent la nécessité de la voir arriver au plus tôt devant les tribunaux. Plutôt que de laisser l’affaire s’envenimer inutilement dans l’opinion, les juges feraient bien de statuer, comme ils l’ont fait pour les caricatures de Mahomet, leur décision faisant jurisprudence une fois pour toutes.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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[1] Un auteur, on s’en souvient, lourdement condamné à payer une indemnité à Moulinsart pour contrefaçon et qui a vu sa maison saisie par un huissier.
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