"Limbo" : exorciste cherche fantôme

Depuis qu’elle est toute petite, Aurora Edelweiss voit les fantômes, les revenants et autres esprits qui parcourent le monde à l’insu des vivants. Dans une société qui ne croit pas au paranormal, un tel don peut être difficile à vivre, mais la jeune fille décide plutôt d’en tirer profit en lançant son entreprise d’exorcisme. Cette activité lui permet surtout d’enquêter sur les Essences d’Âmes, des artefacts légendaires dont l’existence-même n’est pas certaine, et qui semblent liés à la disparition de sa mère.

Si la plupart des "affaires" pour lesquelles elle est sollicitée tiennent plutôt de la superstition ou de la crédulité de ses clients, il lui arrive parfois de faire face à de véritables fantômes malintentionnés et potentiellement dangereux, les Onirios.

Au cours d’une enquête qui s’annonçait banale, elle va faire face à l’une de ces créatures et, au cours du combat, elle se retrouve projetée dans les Limbes, un autre plan de l’existence où elle découvre la véritable nature des Essences d’Âmes. Sa quête ne fait alors que commencer...

LIMBO © 2022 Ana Cristina Sanchez / Editorial Planeta S.A.

S.O.S. Fantômes

Ana C. Sanchez est une des pépites européennes du vivier Glénat Manga. On doit à l’autrice espagnole quelques-uns des Shojos les plus saisissants de la nouvelle collection Shojo+ de l’éditeur. Le dernier en date, Sirius, nous avait particulièrement séduit. On la retrouve avec Limbo dans un registre assez différent, preuve s’il en fallait que mettre des auteurs et autrices dans des cases s’avère bien souvent trompeur.

Car à l’instar de ses titres de Shojo+, qui ont tout pour plaire à un large public et ratisser bien au delà de la cible initiale des Shojos, Limbo (classé en Shonen) a tout pour séduire les amateurs de manga qu’ils soient hommes, femmes ou autres. Et force est de constater que l’autrice s’en sort aussi bien dans des récits riches en émotions et propices à la contemplation, que dans des aventures plus palpitantes et bourrées d’action.

Un monde fantastique plein de mystère, de l’action en barre, chapitre après chapitre, des personnages marrants, badass, attachants, une mascotte trop mignonne... Tous les ingrédients sont réunis pour un titre qui ne peut que faire l’unanimité, à condition qu’on soit client du genre.

Comme d’habitude avec Sanchez, le dessin est soigné et particulièrement généreux. Les arrières-plans sont aussi travaillés et détaillés que les éléments à l’avant-plan, les chara-designs fourmillent d’inventivité (et trahissent les grosses influences vidéo-ludiques de l’autrice)... L’histoire est très intrigante, on voit se dessiner des enjeux conséquents tout en conservant la légèreté d’une histoire tout-public sacrément fun.

LIMBO © 2022 Ana Cristina Sanchez / Editorial Planeta S.A.

La seule particularité du titre susceptible de déplaire à quelques lecteurs (et qui trahit son origine européenne plutôt que nippone) est le caractère très "verbeux" de l’histoire : beaucoup de texte à chaque page, bien plus en moyenne que dans un manga classique. D’aucuns pourraient dire que c’est parfois un peu trop dans certains dialogues, mais c’est vraiment pour chipoter.

Le plus gros point d’interrogation concerne la durée de la série : l’intrigue esquissée peut aussi bien se résoudre en quelques volumes qu’au terme d’une série-fleuve. Dans un cas comme dans l’autre, il ne fait aucun doute que l’autrice saura nous garder captifs, son talent n’est plus à prouver.

Un mois avant la Japan Expo 2023, Glénat nous dévoile ce qui pourrait bien devenir un nouveau poids-lourd du manga made in Europe, qu’on sera ravi de faire dédicacer par l’autrice sur le stand de l’éditeur (et ActuaBD aura la chance de la rencontrer pour une interview, stay tuned...).

Limbo s’annonce comme un titre à suivre de près, qui rappelle une fois de plus le talent des mangakas européens et confirme le statut d’autrice accomplie d’Ana C. Sanchez. On souhaite à sa série tout le succès du monde, elle le mérite sans l’ombre d’un doute.