L’infâme Vom Syrus est toujours en fuite. Pour le rattraper, Ralph Azham se résout à faire alliance avec le roi, qu’il a pourtant combattu lors de l’ensemble de sa saga. Mais pour espérer maîtriser leur ennemi commun, il leur faut d’abord récupérer la baguette d’Anghtar, aux mains d’une communauté de magiciens pas vraiment accueillants…
Nous avions décortiqué en détail cette nouvelle série de Lewis Trondheim dans notre précédent article. Le tome 6 se terminant sur un étonnant retournement de situation, il restait à voir si l’auteur parviendrait à soutenir le suspense jusqu’à la fin de sa saga.
Si le rythme général est un peu moins trépidant dans ce dernier tome (en partie à cause des séquences sensées démontrer le fond de générosité du héros), cette conclusion se révèle à la hauteur des attentes du lecteur. Ce qui séduit surtout, c’est la minutie de la construction de cet univers : la magie, les reliques, le caractère des personnages, tout ceci s’imbrique pour former une matrice multiple dans laquelle Trondheim se tend des pièges qu’il déjoue un peu plus tard, prouvant ainsi son habilité de scénariste et sa dextérité à gérer des mondes complexes.
L’humour à froid de l’auteur (qui transparaît très directement dans le caractère de Ralph Azham) cède le pas à l’action qui mène vers la conclusion de la série. Si on rit donc moins, on se passionne d’autant plus pour la destinée des personnages que l’on a accompagnés pendant plus de trois cents pages. En réalisant une telle saga en solitaire, enluminée par les très belles couleurs de Brigitte Findakly, Trondheim prouve, s’il était nécessaire, qu’il demeure un très grand auteur contemporain, capable de divertir intelligemment les différentes générations de lecteurs, tout en tenant le rythme d’une publication effrénée (un album tous les six mois).
En plus de l’action et de l’humour (souvent acerbe) du personnage central, Trondheim glisse dans sa série une intéressante réflexion sur le rôle du héros, en particulier quand il est lié à une prophétie. D’où ses questions sur l’utilité de la religion et ses interrogations sur le pouvoir politique et ses responsabilités. Enfin, toute la série développe un cheminement lié à la confiance entre deux personnes : amour et amitié doivent-ils être doublés d’une vérité à toute épreuve, même dans les pires moments ? " - Est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime" titrait justement le premier titre de cette saga. Le dernier volume du périple ne répond bien entendu pas à la question, mais bien des pistes ont été explorées.
À la lecture du titre de cet album Une fin à toute chose, on comprend que Trondheim voulait conclure définitivement sa saga sur ce septième tome. "Toute bonne chose a une fin" serait-on également tenté de lire en filigrane de ce titre... Et c’est sans doute l’un des travers de Lewis Trondheim : se croire suffisamment supérieur et doué pour juger lui-même sa série de façon positive. Le plus énervant, c’est qu’il a bougrement raison !
(par Charles-Louis Detournay)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Participez à la discussion