Cette entreprise éditoriale est risquée, car écrire la biographie de Jacques Stoquart revient à raconter la vie du "scénariste inconnu" préférant subvenir discrètement aux besoins de sa famille et se consacrer à son métier de publicitaire que de courir les festivals et les médias. Stoquart est l’archétype du scénariste invisible tel qu’on le rêvaient les éditeurs dans les années soixante.
Devenu scénariste malgré lui peu après avoir dépassé les quarante ans, il doit sa vocation à l’intervention involontaire de... Jean-Michel Charlier qui, occupé par ses projets audiovisuels, avait délaissé La Patrouille des Castors, laissant ainsi son dessinateur, Mitacq, sans possibilité de dessiner la suite. Le dessinateur réalise seul la première histoire d’une nouvelle série, Stany Derval. Mais en manque d’idée pour le deuxième tome, le dessinateur se tourna alors vers son ami Jacques Stoquart, rencontré des années plutôt dans les milieux catholiques bruxellois. Le publicitaire jouisant d’une bonne plume accepta le défi non sans quelques hésitations. La machine était lancée. Stoquart écrira des bandes dessinées jusqu’au début des années ’90.
Marie Moinard revient avec lui notamment sur ses amitiés avec René Follet et Mitacq, sur la création de Ramiro par William Vance, et sur les différentes adaptations en BD d’œuvres littéraires qu’il a réalisées pour le compte des éditions Claude Lefrancq. L’une des plus remarquées fut sans nul doute Edmund Bell, un personnage inventé par John Flanders (alias Jean Ray), et mis en image par son complice René Follet.
Quelques années plus tôt, les deux compères avaient créé ensemble Ivan Zourine. Les trois albums de cette série viennent d’être réédités par les labels conjoints Des Ronds Dans l’O et les éditions François Boudet. On apprend également dans ce livre que Jacques Stoquart a écrit des biographies dessinées sur quelques grandes figures catholiques, recevant le prix du meilleur album de la bande dessinée chrétienne, en 1992, pour Ignace (avec Cécile Schmitz, au dessin).
La biographe, Marie Moinard, nous dresse un portrait d’un homme touchant, sensible, timide, fidèle en amitié et à ses convictions reliegieuses. Un scénariste consciencieux qui s’attachait à se rendre le plus souvent possible sur les lieux de ses histoires pour mieux ressentir ce que ses héros auraient pu vivre…
(par Nicolas Anspach)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Jacques Stoquart, sur les pas d’un scénariste - Par Marie Moinard – Des Ronds dans L’O.