Un bébé si je peux – Marie Dubois – Massot Ed. / Revue XXI

Journaliste et dessinatrice, Marie Dubois vit une histoire de couple ordinaire et équilibrée : un copain stable, une situation, une vie sociale… Comme pour beaucoup de couples, se pose la question d’avoir un enfant. C’est là que le fleuve tranquille se transforme en tourbillon, lorsqu’elle apprend, après deux ans d’essais infructueux, qu’elle est infertile à cause d’ovaires « polykystiques ». Comme elle l’explique avec humour, ses ovaires sont de gros flemmards qui ne veulent pas bosser, mais alors pas du tout…

Elle explique alors le parcours du combattant qu’elle commence et où elle nous entraîne, entre FIV, PMA, adoption, sans rien nous épargner de ses états d’esprits ni des préjugés auxquels elle est constamment confrontée : « Tout ça, c’est dans ta tête », « C’est le stress », « Arrête d’y penser, ça viendra tout seul », « Je connais quelqu’un qui est tombé enceinte juste après avoir adopté » …
Car on connaît toujours « quelqu’un qui… ».

Ces préjugés, elle va les battre en brèche, toujours avec beaucoup d’humour. Elle nous présente aussi les relations parfois difficiles et très « cliniques », très impersonnelles, avec le personnel hospitalier. Mais aussi les difficultés quotidiennes à prendre des hormones à haute dose qui dérèglent votre corps et votre esprit, avec une franchise touchante. Et la vie de couple, bien entendu, forcément perturbée par cette épreuve.

Entre euphorie, doute et abatement

© Marie Dubois

L’expérience de journaliste de Marie Dubois apporte une touche supplémentaire et permet d’aller au-delà d’un simple récit d’expérience, au demeurant déjà intéressant mais que l’on peut retrouver dans d’autres albums. Elle lit, enquête, recueille des témoignages, pour nous proposer une analyse un peu plus poussée faite de statistiques et de synthèses qui se veulent le plus objectif possible.

A-t-on vraiment conscience aujourd’hui que l’infertilité se développe dans le monde entier, et en particulier dans les pays dits « développés », au-delà du simple fait de la réduction de la natalité due à la transition démographique ? Si ce phénomène s’aggrave, nous risquons d’avoir un réel problème dont la société ne semble pas avoir pris la pleine mesure, à part par l’intermédiaire de quelques œuvres de fiction dystopique comme La Servante écarlate. Et ce phénomène est sans doute lié à la généralisation des perturbateurs endocriniens, présents dans tout notre environnement, de notre alimentation aux vêtements que nous portons.

Au-delà du récit de vie, cet album se veut aussi un lanceur d’alerte et d’éveil des consciences, ce qui lui donne toute sa profondeur. Un album qui mérite d’être lu et surtout partagé.

La froideur des statistiques

© Marie Dubois