Le héros de cette histoire est un jeune Congolais de douze ans, Nivek, qui a un rêve en tête : celui d’échapper à sa condition d’esclave devenu enfant-soldat au Kivu. Il espère conduire son destin voué à la misère en des terres moins hostiles. Pour cela, il doit traverser une Afrique immense, dangereuse, aux frontières impénétrables, sources de mille et une tragédies. Pour l’accompagner, il y a Joseph, doué pour la cuisine. L’un et l’autre arrivent à sortir des griffes des milices du Kivu qui exploitent les enfants dans les mines. Non sans avoir vécu auparavant les pires atrocités qui les ont transformé en guerriers.
Les attendent la jungle et ses animaux sauvages parfois moins dangereux que les hommes, la savane où Nivek perd son compagnon Joseph, le désert jusqu’en Libye où il rejoint un groupe d’infortunés comme lui, avant d’être capturé et vendu comme esclave… Enfin, après son évasion, la traversée de la Méditerranée où des passeurs peu scrupuleux l’envoient une fois encore vers la mort.
Sur le chemin, entre mille situations des plus affreuses, des coups de chance, des êtres amicaux qui l’aident à passer le cap. L’Espagne est sa dernière étape sans qu’on en connaisse la suite. Suffisamment pour comprendre que le guerrier est mentalement armé pour affronter l’Europe. Ce n’est plus un enfant depuis longtemps…
L’éditeur de cette BD a raison de convoquer pour en parler Mark Twain et Cervantès, nous sommes dans le même degré de puissance, mais cette histoire est bien contemporaine. Non seulement le scénario vous happe à chaque instant, mais le graphisme déployé par García Sánchez est d’une implacable beauté.
Observez ce dessin de couverture : sur la tête -dans les cheveux- un futur étoilé aux millions de possibles ; sur le visage, à même la peau, le souvenir de tout ce qui l’a construit pleinement intégré dans son être. Quand vous croiserez un migrant dans le métro ou au coin de la rue, croyez-moi, vous ne pourrez plus, à la suite de cette lecture, le regarder comme avant.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Le Ciel dans la tête – Par Antonio Altarriba, Sergio García Sánchez et Lola Moral – Denoël Graphic