On ne pouvait rêver meilleur parrainage. Formula Bula qui se revendique comme un évènement associant « bande dessinée et arts associés » ouvrira ses portes à Saint-Ouen (banlieue parisienne) du 12 au 15 Mai prochains. Les organisateurs ont eu l’intelligence d’en confier la direction artistique à l’équipe de la revue Ferraille.
La revue Ferraille est l’émanation d’une structure éditoriale d’inspiration « underground », collectif d’auteurs de bande dessinée originaire d’Albi cornaquée par Marc Pichelin et Pierre Druilhe, les Requins marteaux. Elle voit le jour en 1996 et réunit quelques-unes des meilleures signatures de la bande dessinée alternative œuvrant notamment dans le registre de l’humour. Elle devient Ferraille Illustré à partir de janvier 2003, diffusée en kiosque de façon un peu aléatoire. c’est un peu le laboratoire d’une nouvelle génération qui participe au renouveau de la bande dessinée des années 2000 au même titre que d’autres labels alternatifs comme L’Association, Ego comme X, Atrabile ou Cornélius.
On y retrouve un peu les mêmes ferments que ceux de la BD Underground des années 1960 : un graphisme innovant, d’humour et d’humeur, marqué par un refus des schémas consuméristes, mais aussi en référence (et non révérence) par rapport à certains classiques de la bande dessinée populaire, si possible de « mauvais genre » : les petits formats, Strange, Pif Gadget, etc.
Il n’y a pas aux Requins marteaux la volonté d’inscrire des œuvres au patrimoine de l’humanité mais bien de rester dans la création en dehors de toute contingence. La manœuvre est payante puisque l’un de leurs albums, le magnifique Pinocchio de Winshluss a emporté le Prix du Meilleur album à Angoulême en 2009.
Ferraille, ce sont aussi ces happenings-canulars découverts à Angoulême en 2003, les « supermarchés Ferraille » qui tournent en dérision la grande distribution en donnant « un coup de boule dans les prix », ces faux documentaires de télévision (M. Ferraille), des expositions éphémères et improbables, des productions musicales décoiffantes, etc.
C’est précisément ce qui a intéressé les promoteurs de Formula Bula qui font ce constat : « La bande dessinée indépendante a trouvé sa source dans les années 70/80 avec des auteurs tels que Carlos Giménez ou Pierre Christin ayant pris leurs distances avec ce qu’on appelle la bande dessinée franco-belge. Des thèmes jusque-là réservés à la littérature, comme l’autobiographie, le roman graphique ou la politique ont été développés tout en utilisant des techniques d’expressions graphiques très diverses. […] Ces artistes vont décomplexer et faire éclater les cloisons qui enfermaient, jusque-là, la bande dessinée. Issus de formations très diverses, ils vont multiplier l’utilisation des médiums pour s’exprimer. C’est ainsi qu’on voit Blutch, Riad Sattouf, Marjane Satrapi ou Winshluss s’investir dans le cinéma ou la musique… »
C’est cette bande dessinée désenclavée que l’on retrouvera à Saint-Ouen le 12 mai prochain avec des invités prestigieux (auteurs de BD : Blutch, Carlos Gimenez, Riad Sattouff, Emmanuel Guibert, Jens Harder, Nine Antico, Guillaume Bouzard, Pierre Christin, Cizo, Émile Bravo, Rémi, Guillaume Dumora, etc…, acteurs : Sabine Azema, Michel Piccoli, Irène Jacob…, musiciens, etc.), sept expositions qui resteront visibles pendant un mois (Gimenez, Jens Harder, Emile Bravo, Histoires de chemins : El Emigrante, Guillaume Bouzard ; Football, football, le « Panorama » de Rémi, les « Contes nocturnes » de Boris Hurtel) des rencontres, des ateliers ouverts à tous, une sélection de films, des lectures-spectacles (notamment avec Blutch) ainsi qu’une soirée-concert de rock intitulée « Je hais les dédicaces »...
Chaudes journées en perspective !
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Pour en savoir plus, LE SITE DE FORMULA BULA
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