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"D.O.W." : le nouveau justicier-graffeur de Dupuis

Par Charles-Louis Detournay le 23 septembre 2020                      Lien  
La maison de Marcinelle frappe fort avec un nouveau héros grand public, conçu de main de maître par Barboni ("Monika", "Hibakusha") et Gabor ("Isabellae"). Avec trois tomes de 56 pages à paraître en douze mois, il ne faut pas rater le départ !

Certes, il est masqué, mais il ne détient pas de super-pouvoirs. D.O.W. n’est pas non plus un Batman français, car il ne cherche pas à arrêter les criminels lui-même, mais il les dénonce et aide ainsi la police à combattre le crime. Ce « lanceur d’alerte » utilise d’ailleurs une technique aussi particulière que spectaculaire, car il réalise de gigantesques et somptueux tags sur les buildings ou les propriétés des criminels, afin de braquer le regard des médias sur leurs méfaits. Aux yeux du public, il incarne une vision moderne du super-héros, cherchant à améliorer le sort de notre société.

Mais qui est ce mystérieux street artist signant de ces étranges initiales : D.O.W. ? Sasha, une jeune médecin va par hasard croiser sa route lors d’une intervention chez Aliocha, un célèbre tatoueur prisé de la jet set internationale autant que de la mafia russe. Un peu plus tard, blessé par balle, le tatoueur-justicier Aliocha vient sonner au domicile de la jeune femme, l’entraînant ainsi à découvrir d’une terrible vengeance qui unit trois familles russes émigrées.

"D.O.W." : le nouveau justicier-graffeur de Dupuis

Voici le tableau de cette nouvelle série présentée chez Dupuis et conduite par Thilde Barboni au scénario et Gabor au dessin et à la couleur. Depuis dix ans, l’écrivaine Thilde Barboni fait des incursions en bande dessinée. Il est souvent question de personnages sensibles en rupture avec le monde qui les entoure. Sa passion envers la bande dessinée qui s’est intensifiée avec le temps : « J’adore la bande dessinée. La collaboration avec un dessinateur est magique. Chaque fois que je reçois les planches réalisées, que je vois mes personnages sortir de la plume du dessinateur, c’est la même émotion. En plus, la bande dessinée est, contrairement à ce que l’on pourrait croire, une discipline super exigeante : le format, les cases, le nombre de planches … Il faut se plier à énormément de contraintes et j’aime cela. »

« L’autre différence à mes yeux est qu’on travaille vraiment en équipe. Avec le dessinateur bien entendu, mais l’équipe éditoriale est également très importante, la fabrication aussi. C’est un peu comme au cinéma. Sans l’équipe, rien ne fonctionne. Et puis, ce qui est extraordinaire en bande dessinée c’est que l’on peut inventer ce que l’on veut du moment que le dessinateur suit. La « conception » de D.O.W. a été un grand moment. Cela faisait tellement d’années que j’avais envie de développer les aventures d’un héros puissant mais qui s’est fait lui-même, avec sa force et sa fragilité. Quand je l’ai vu sur papier, j’ai été comblée. Le travail avec les dessinateurs est chaque fois une expérience formidable. »

La sensualité de l’écriture de Barboni se ressent, même si l’album reste plus grand public que "Monika"

Un récit charpenté

Avec D.O.W., l’écrivaine-scénariste franchit clairement un cap. La construction du premier tome de cette série est fignolée avec maîtrise et minutie. Aventure, passion, thriller, luxe, danger, amour et trahison : tout est présent et savamment dosé pour passer un excellent moment de bande dessinée.

En effet, ce premier tome ne présente aucun temps mort malgré ses cinquante-six planches. L’intrigue rebondit en permanence, brossant progressivement (et sans dérouter le lecteur) un tableau de plus en plus complexe et passionnant. La clé tient sans doute à tous ces petits éléments disséminés par la scénariste. Chaque fois que l’on croit distinguer une faille, un élément un peu gros ou facile, elle déjoue le problème pour transformer la faille en atout, afin de faire gagner à chaque fois les personnages en épaisseur.

Les personnages ne manquent en effet pas dans ce premier tome : cinq principaux et pas mal de secondaires ! Même si tout n’est pas encore dévoilé, le premier tome permet de bien comprendre les motivations de chacun, et surtout de créer un réel lien entre eux et lecteur, même pour les individus les plus sombres.

En effet, nos différents personnages sont reliés par le passé de leur famille, tous des Russes blancs émigrés après les révolutions de 1917. Cette part de mystère, de secret et d’obligations transmis par l’hérédité leur confère beaucoup d’épaisseur. Et l’on en vient à se poser cette question : est-ce qu’un descendant peut souffrir par le mal perpétré par quelqu’un de sa famille ?

Gabor : entre tatouage et Riviera

L’autre grande surprise de cette nouvelle série réside dans le dessin de Gabor qui s’impose et séduit dès la première pleine-page. Même si on avait déjà pu apprécier à sa juste valeur son travail dans le passé, ses précédentes séries sur Curiosity Shop, les Patriciens et Isabellae ne laissaient pas présager une si belle maîtrise du décor urbain et contemporain !

La première pleine-page du récit entraîne directement le lecteur dans un thriller haletant

Gabor joue magnifiquement de ses compositions de planches : qu’ils soient tatoués ou non, les personnages vivent réellement au gré des rebondissements qui s’enchaînent. Même si certaines couleurs auraient pu être plus appuyées, les scènes nocturnes sont parfaitement mises en lumière. Les scènes d’actions sont aussi très réussies et rythment réellement ce premier opus, comme nous l’a confirmé Thilde Barboni : « Le dynamisme des planches de Gabor a influencé l’écriture du volume 2 et du 3 de cette nouvelle série. D.O.W. va explorer différents moyens de voler dans les airs. Gabor dessine vraiment bien ces instants-là… Vous allez être surpris dans le volume 2 ! »

Trois tomes en douze mois

Une promesse alléchante car le tome 1 comporte déjà tout son lot de surprises avec son intrigue très complète, agrémentée en bonus d’un cahier graphique pour découvrir les coulisses de la série.

Une pagination qui va demeurer pour les prochains tomes, d’autant que leur parution va suivre très rapidement, comme nous le confiait la scénariste : « Prévu pour mars 2020, le virus a décalé la sortie de ce premier tome au mois de septembre. Du coup, la sortie du second tome est rapprochée car il paraîtra au printemps prochain, et le tome 3 est prévu pour septembre 2021. »

Passionnant dans sa présentation du monde des tatoueurs et des familles issues de l’émigration des Russes blancs, D.O.W. est aussi réussi au dessin qu’au scénario, les deux se soutenant l’un l’autre pour proposer une passionnante introduction à une série qui fera certainement du bruit ! Certainement l’une des nouvelles séries marquantes de cette fin d’année !

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9791034731398

D.O.W., tome 1 : Les Ailes du loup - Par Gabor & Thilde Barboni - Dupuis

Concernant D.O.W., lire également notre interview de la scénariste Thilde Barboni : « D.O.W. tatoue des stars et des mafieux le jour, tandis que la nuit, il dénonce des crimes. »

Thilde Barboni sur ActuaBD :
- Hibakusha - Par Barboni & Cinna - Dupuis
- Monika - Par Barboni & March - Dupuis : tome 1 et tome 2
- L’interview de Guillem March & Thilde Barboni concernant Monika : « Notre personnage Monika est une personnalité complexe : elle affronte ses peurs quand elle est travestie. »
- Rose d’Elisabethville - Par Thilde Barboni & Séraphine - Dupuis (Aire Libre) et l’interview de Séraphine & Thilde Barboni : "Rose d’Elisabethville" est une fiction, mais des événements historiques réels sont en filigrane !"
- sa participation au collectif Vampyres

Concernant Gabor, lire :
- La série Isabellea tire sa révérence dans un final épique
- son interview "J’ai débuté dans l’animation parce que je n’avais pas encore de style suffisamment affirmé pour me lancer dans la BD "

Dupuis
 
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6 Messages :
  • Il y a un moment quand on est dessinateur où il est bon de s’intéresser un peu à l’anatomie humaine... surtout quand on se pique de dessiner réaliste.

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    • Répondu par Somerset le 24 septembre 2020 à  02:20 :

      Rien vu d’ultra choquant du point de vue anatomique dans ces planches... Mais heureusement qu’internet a son lot de critiques d’art anonymes pour aider les dessinateurs à progresser.
      J’avais plutôt apprécié Curiosity Shop et je pense que je me laisserai tenter par D.O.W.

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      • Répondu le 24 septembre 2020 à  09:43 :

        Oui, l’anatomie est assez bancale, mais étant donné qu’il s’agit d’un dessin semi-réaliste, ça passe. Mais c’est très difficile le dessin réaliste, contrairement à ce qu’on pense. Et il faut beaucoup de courage aux jeunes auteurs pour se lancer dans ce style si décrié.

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        • Répondu le 25 septembre 2020 à  08:55 :

          Le problème n’est pas là. Le problème est que Dupuis fait du comics et pas du franco-belge. Dupuis sert la soupe à l’américanisme plutôt que défendre ce qui fait l’originalité et donc la force de son patrimoine. 9a sert à rien de vouloir faire made in USA quand on es belge. Il faut faire belge mais belge d’aujourd’hui, pas d’y a soixante ans. Les américains sont les mieux placés pour faire américain. Faut creuser dans son patrimoine pour en tirer quelque chose de neuf pas céder aux sirènes du mercantilisme facile !

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          • Répondu par kyle william le 25 septembre 2020 à  18:06 :

            Jijé, Jacobs, Morris... autant de grands dessinateurs belges nourris d’influences américaines..

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            • Répondu le 27 septembre 2020 à  07:18 :

              Pour en faire autre chose, pas de pâles copies de bandes américaines.

              Répondre à ce message

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