L’histoire débute avec la toux d’un homme dans la nuit. Cette onomatopée est le seul et unique son qui rythme l’album. On le voit qui se réveille auprès de sa compagne, boit un peu d’eau et se rendort. On suit ensuite sa journée, assez classique, de cigarette en cigarette. Et lorsqu’on lui découvre un cancer au poumon, ce sont ses souvenirs qui se déploient au fil des pages : sa première cigarette, sa première petite amie... Cauchemars et souvenirs finissent par s’entrelacer dans des volutes de fumée.
Sans parole mais non sans voix, ce récit traite du sujet difficile de la fin de vie d’un malade du cancer, affection due ici à une habitude ordinaire, qui semble anodine. Les deux autrices s’emparent d’un thème qui nous touche tous, de près ou de loin.
Si le sujet de l’album est loin d’être léger : on n’a pas de mot, selon l’expression consacrée, sans texte, les images prennent une importance supérieure. Notre homme aux gestes lents n’a pas d’identité, oil gravit une à une les marches de l’enferenfers. Les seuls textes sont des onomatopées d’une toux qui déchire le silence, une toux qui cadence et qui hante les pages.
Dans son scénario, Chadia Loueslati interroge intelligemment la question du choix, lequel, a priori anodin, peut avoir de lourdes conséquences. Mais il y a de de l’amour dans ces moments suspendus, dans ces instants précieux qui sont autant de beaux instants de poésie et d’émotion, ces bribes d’une vie qui s’effiloche. Sans être moralisatrice, Loueslati nous émeut et nous captive.
Au dessin, Nina Jacqmin réalise une fresque entre cendre et fumée, surprenamment légère, quasiment éthérée. Un camaïeu de gris ponctué touches de rouges anime un dessin admirablement maîtrisé et délicat.
Un ouvrage poignant.
(par Thelma SUSBIELLE)
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Fumée - Par Chadia Loueslati et Nina Jacqmin - MARAbulles - 144 page - 17,95 €