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Gundam : la folie des robots géants

Par Jaime Bonkowski de Passos le 20 juillet 2022                      Lien  
Si vous êtes un habitué des salons et festivals geeks, ou simplement un fan de culture manga, vous les avez forcément déjà croisés : les robots géants. Goldorak, Mazinger Z, Pacific Rim, RX 78-2 : les grands noms ne manquent pas. Et si au Japon les méchas constituent un genre à part entière, en France la tendance se fait plus discrète. Une association s'est donc imposée la tâche de changer cela et de porter les méchas au firmament : rencontre avec l'Association pour l'Essor de l'Univers Gundam.

De notre point de vue français, on a du mal à se représenter le phénomène Gundam au Japon. C’est simple : en termes d’influence sur la population, de renom et de capacité à traverser les générations, on lit souvent quel’univers Gundam est le Star Wars nippon. La première série est lancée en 1979, créée par Yoshiyuki Tomino et Hajime Yatate sous le nom de Mobile Suit Gundam ou MBS.

Quarante ans plus tard, l’univers s’est étendu sans discontinuer, et on dénombre aujourd’hui une trentaine de séries, films et OAV, plusieurs jeux-vidéo sur toutes les générations de console, et des dizaines de romans et mangas. Mais plus encore, c’est par le jouet que Gundam construit son empire. Aussi répandus que nos GI-Joe et autres Barbie, les modèles réduits des robots les plus emblématiques de l’univers Gundam sont déclinés en figurines, jouets télécommandés, statuettes, et surtout maquettes.

Tandis qu’en Europe et en Occident, le modélisme est surtout connu pour ses représentation de trains ou d’avions de la Seconde Guerre mondiale, au Japon c’est à travers les méchas que les maquettes se répandent dans les pratiques culturelles.

Gundam : la folie des robots géants

En France, les méchas ont remporté un certain succès dans les années 1980, essentiellement via des séries inspirées ou postérieures à MBS. La plus célèbre étant évidemment Goldorak. Mais les animés Gundam sont restés assez confidentiels, les plus récents n’étant partagés que par une communauté de fans hardcore et fidèles à travers les plateformes de SVOD et de simulcast.

Il n’en va pas de même pour les maquettes. Au contraire, les modèles réduits Gundam rencontrent depuis quelques années un succès qui dépasse largement la confidentialité de leurs séries-mères.

Le phénomène s’explique difficilement, mais plusieurs analyses permettent de le comprendre. Tout d’abord, les Gundam sont classes. Et il ne s’agit pas là d’une vue de votre rédacteur-fan : le design des Gundam est travaillé et pensé pour être le plus attirant possible dans un mélange de Science-Fiction, de réalisme militaire et de grandiose quasi-divin. Ainsi, il n’est pas nécessaire de connaître la série Gundam pour être charmé par le RX 78-2 (le modèle de base des Gundam, premier du nom) ou n’importe lequel des modèles qui ont suivi.

Et dans le film de Spielberg, acclamé par les fans : Ready Player One, un Gundam a même droit à son caméo badass en fin de film, preuve supplémentaire que d’une manière ou d’une autre, l’imagerie de ces robots géants à antennes jaunes a fait son bout de chemin dans notre culture occidentale.

À Paris, une boutique entièrement dédiée aux Gundam a ouvert en 2020 Boulevard Voltaire. Une véritable Mecque pour les amateurs qui y trouvent des modèles rares importés du japon, et dont la vitrine fascine même les plus néophytes avec sa statue de plus d’un mètre de haut. L’enseigne enfile en outre une casquette de musée : au sous-sol on trouve des pièces exceptionnelles qui ont été présentées aux Championnats du Monde (oui, oui, ça existe, regardez sur Google image, ça claque), et qui s’apparentent à de véritables œuvres d’art.

L’univers Gundam doit en partie sa popularité grandissante en France aux effort de l’association AEUG (Association pour l’Essor de l’Univers Gundam), qui promeut l’univers des Gundam sur tous les événements geeks comme la Japan Expo, avec des stands d’initiation et des ateliers d’approfondissement pour tous les niveaux, une manière d’introduire de nouveaux fans au vaste univers Gundam par le biais des maquettes.

À l’occasion de la Japan Expo, nous avons rencontré le président et fondateur de l’AEUG, Jean-Philippe Dubrulle.

Tout d’abord qui êtes-tu et d’où venez-vous ?

JP : Je suis Jean-Philippe Dubrulle, et j’ai fondé l’association pour l’essor de l’univers Gundam, ou l’acronyme AUEG, qui est une référence à l’animé, en 2009. J’étais alors encore étudiant, et je suis depuis traducteur d’animé et de manga, ce qui est plutôt pratique quand on gère une assoce liée à un anime.

Comment avez-vous découvert l’univers Gundam ?

JP : Comme beaucoup de gens de ma génération en France, j’ai découvert Gundam avec la diffusion de Gundam Wing sur M6 au début des années 2000. Moi j’aimais déjà bien les robots géants, quand j’étais petit je ne regardais pas Power Rangers pour les mecs en collant mais pour les robots, donc le métal et les méchas ça me parlait et j’ai tout de suite été charmé ! Ça a commencé comme ça, puis j’ai grappillé ce que je pouvais. Il y a eu deux sorties Gundam en France dans les années 2000 à la télé, c’est comme ça que le virus a pris. Ensuite j’ai d’abord fait un site web sur l’univers Gundam, pour en parler et faire connaître l’univers, et avec des copains au bout d’un moment on s’est dit que c’était dommage de limiter notre audience à seulement ceux qui connaissent déjà Gundam, parce que ceux qui fréquentent le site sont forcément des gens déjà fans, donc a créé une association pour aller au contact des gens qui ne connaissent pas.

Cette association, sur les événements au cours desquels vous participez, se structure beaucoup autour des jouets.

JP : Le modélisme et les jouets c’est un élément important de l’univers Gundam, mais nous en tant que "puristes", on est vraiment à la base conquis par l’animé et l’univers, et c’est ça qu’on cherche avant tout à promouvoir. Après, le modélisme c’est une super-porte d’entrée pour les gens en festival parce qu’ils voient notre stand et plutôt que de voir des jaquettes de DVD ou des couvertures de manga, ils voient des gros robots, des maquettes, etc. Ça attire l’œil et ça permet de briser la glace facilement, pout ensuite amener les gens à découvrir l’univers en leur disant "Gundam c’est les jouets tout ça c’est très bien, mais y’a pas QUE ça". Beaucoup d’autres sagas n’ont pas ces supports physiques, et c’est une vraie force de Gundam. Mais sans chercher à la dévaloriser ou quoi, pour nous les maquettes sont une sorte d’appât, pour introduire les gens au reste. Nous sommes avant tout passionné par les œuvres.

L’univers Gundam en 2022, c’est une trentaine de séries, un tas de mangas et d’OAV, les figurines, les jeux-vidéo… Est-ce que ce n’est pas un peu effrayant pour les néophytes, qui ne savent pas forcément par où commencer ?

JP : C’est vrai qu’il y a beaucoup de matière et c’est un univers très dense, mais c’est un peu comme les comics ou Marvel : ça veut dire qu’on a plein de points d’entrée possibles, et qu’à peu près tout le monde peut trouver ce qu’il aime. Ce qui est un peu plus difficile souvent, c’est de briser les à-priori qui peuvent exister sur le genre du mécha. L’image qui colle au genre, c’est que c’est un peu débile, un peu bourrin, pas très subtil, gamin, et ça c’est une conséquence du fait que pendant très longtemps, il n’y a pas eu de méchas en France.

Il y a quarante ans, on avait Goldorak, véritable phénomène qui faisait quasiment 100% de part d’audience à la télé et qui était un formidable représentant des méchas, mais après ça, il y a eu très peu de choses et l’imaginaire mécha a un peu disparu en France. C’est surtout ça qui bloque les potentiels nouveaux fans, qui se disent que les histoires de robots géants, c’est forcément un peu gamin. Alors qu’on a plein de façon d’aborder le thème dans Gundam, et les robots sont souvent des prétextes pour parler d’autres choses, plus profondes.

Depuis quelques temps, avec les confinements dus à la pandémie, on voit un retour en force des activités autrefois catégorisés un peu geek ou nerd, comme le modélisme, les jeux-vidéo, les jeux de rôle, les Warhammers, etc. Ça a un impact sur l’essor de Gundam ?

JP : On sait qu’il y a eu plusieurs points d’étape dans la progression des Gundam et des méchas dans le cœur des gens, avant même le Covid. Et d’abord ça a été Hollywood, avec les films Godzilla et surtout Transformers, qui ont remis au goût du jour les robots, les monstres géants, les kaijus, le gigantisme, des thèmes très "Gundam". Ensuite, il y a eu Pacific Rim, évidemment, et le caméo de Gundam à la fin de Ready Player One, qui ont continué à ancrer ces personnages et ces robots dans les mentalités. Et puis enfin, l’essor énorme de la culture geek et nerd qui a été dédiabolisée et qui s’est ouverte à des pans entiers de la population, notamment avec les confinements et le COVID. Pour Gundam et les jouets, ça se voit très bien au niveau des chaînes d’approvisionnement : tous les vendeurs de maquettes vous diront que s’ils pouvaient en commander deux fois plus, ils le feraient parce que ça se vendrait. Et d’ailleurs, Gunpla, l’entreprise derrière les maquettes, va ouvrir une deuxième usine au Japon pour assurer la production, donc ça montre bien l’évolution de la licence, en France et dans le monde. Il y a un effet de mode ou une mise en lumière de toutes les cultures geeks, et Gundam en fait doublement partie avec d’une part les œuvres, et d’autre part les maquettes.

Quand on découvre l’univers Gundam, via les réseaux sociaux notamment, on voit tout de suite que la communauté est très bienveillante, et même les fans hardcore et les grands fans des maquettes hyper-talentueux vont encourager et féliciter même les jeunes fans qui découvrent et qui tâtonnent.

JP : C’est vrai que la communauté Gundam en France est très accueillante, notamment parce qu’elle sait qu’elle n’est pas majoritaire. Ça reste encore une niche, donc c’est dans l’intérêt de personne de jouer les gatekeepers et d’empêcher l’inclusion des nouveaux fans. Après ce qui est difficile, c’est qu’en France on a pas UNE communauté Gundam structurée mais plein d’îlots qui interagissent assez peu ensemble. Par exemple, si on voulait annoncer une avant-première exceptionnelle d’un film Gundam, on aurait pas UN groupe sur les réseaux sociaux à solliciter pour être sûr que tous les fans de Gundam soient au courant. C’est aussi ça qu’on essaie de faire avec AEUG : rassembler les communautés et les groupes pour structurer un peu la fanbase.

Si vous deviez recommander une seule série Gundam, pour des gens qui ne connaîtraient pas du tout, ce serait laquelle ?

JP : Oulah, c’est difficile de n’en recommander qu’une ! Déjà, je ne ferai pas les puristes à dire "la première série de 1979, blabla...", parce que c’est vrai qu’elle est super mais elle date un peu, et ce n’est pas forcément le meilleur moyen de commencer, ça sera plutôt réservé à des fans un peu plus aguerris. Non, je recommanderai plutôt Gundam Unicorn, ce n’est pas ma série préférée de Gundam mais c’est la plus facile d’accès. Une super-animation, une super-histoire, elle est assez courte, elle a déjà dix ans déjà, mais elle n’a pas pris une ride, et elle est dispo sur Netflix.

Et si vous deviez recommander une maquette pour des gens qui ne connaissent pas du tout ?

JP : Je dirai le nouveau modèle simplifié du RX 78-2, le premier modèle de Gundam. C’est une nouvelle gamme découverte qu’ils sortent, très simple à monter, très peu de pièces, les couleurs déjà posées, ce n’est vraiment pas cher (10€), et malgré tout il y a une qualité de matériaux, de fabrication qui est incroyable.

C’est un bon moyen de constater à quel point les maquettes sont d’une exceptionnelle qualité car même avec un truc à 10 euros, on arrive à un résultat bien articulé qui rend super-bien. Et après, on peut aussi le customiser, le repeindre, ou juste le laisser tel quel, c’est ça qui est génial c’est qu’avec les maquettes Gundam :- tout le monde, peu importe son niveau de skill manuel et le temps qu’il veut y consacrer, peut arriver à un résultat hyper classe.

(par Jaime Bonkowski de Passos)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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