Nous sommes d’emblée sur le terrain, sous le feu des tirs ennemis. Puis dans un petit retour en arrière, l’album nous explique comment ce jeune Français, partagé entre un militantisme « révolutionnaire » un peu stérile et des jobs où il se trouve à la merci de petits chefs méprisants, se met à s’engager pour la cause kurde, au point de décider de quitter sa famille et d’aller se battre en Syrie contre Daech, l’hydre islamiste qui prospère à ce moment-là en Syrie et en Irak.
Venu d’un pays où le service militaire est aboli, il n’a aucune expérience de la guerre. Qu’importe, on va le former en quelques mois dans des sortes de « brigades internationales » et le confronter à la dure réalité des combats. C’est ce quotidien qui est raconté dans ce journal, jusqu’à la chute de Raqqa, capitale du califat proclamé de Daech.
Le dessin d’Otero, que l’on a vu à l’œuvre notamment dans La Cellule – Enquête sur les attentats du 13 novembre 2015 (Les Arènes), un album qui n’est pas sans connexion avec cet ouvrage, est parfaitement clinique, appuyé sur une abondante documentation photographique. Le récit se lit avec fluidité, la guerre est très bien racontée, distillant une multitude d’informations sur un conflit complexe dont nous n’avons que quelques échos dans nos médias. En cela, l’ouvrage est précieux.
Reste que la partie personnelle du récit, et notamment la question de comprendre quels sont les ressorts idéologiques, voire le romantisme, qui poussent un jeune Français sans lien avec le Kurdistan ou la Syrie à laisser famille et amis pour aller risquer sa vie à l’autre bout du monde, cette dimension-là nous semblent manquer singulièrement ici.
C’est la force et le défaut de la bande dessinée : excellente pour synthétiser des concepts complexes, trop sommaire pour aller au fond des explications. Ne nous en plaignons pas : la pédagogie consiste avant tout à éveiller la curiosité. Et sur ce point, l’exercice est réussi.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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