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Notes de bas de page – Par Nacha Vollenweider – Éditions iLatina

Par Thomas FIGUERES le 30 août 2019                      Lien  
Les éditions iLatina annonçaient hier en fin d’après-midi avoir atteint leur objectif de financement sur la plateforme KissKissBankBank. Une bien heureuse nouvelle pour tous les férus de bande dessinée sud-américaine, et qui plus est, de bon augure à la vue de la qualité de « Notes de bas de page », l’un de leurs deux premiers albums, par la toute jeune Nacha Vollenweider.

Nous vous évoquions le projet il y a peu, les éditions iLatina avaient préparé, pour leur lancement, deux collections distinctes. L’une consacrée à la réédition de grands classiques de la bande dessinée sud-américaine et la seconde, Novela Gráfica conçue pour publier de jeunes auteurs. Le Notes de bas de page de Nacha Vollenweider, la première BD de l’autrice, vient ainsi ouvrir cette nouvelle collection.

Jeune argentine logeant en Allemagne pour ses études, Nacha fait fi de toute pudeur et se livre au lecteur avec une épatante aisance. La jeune femme nous apparaît ballottée entre les côtes européennes et sud-américaines, mais reste maître de son navire. En nous exposant sa quête initiatique d’identité familiale, et par extension personnelle, l’autrice en démontre toute l’essentialité.

Notes de bas de page – Par Nacha Vollenweider – Éditions iLatina
© éditions iLatina
© éditions iLatina

Par le biais de souvenirs familiaux d’abord, puis personnels ensuite, le lecteur est invité à plonger au cœur d’une chronique familiale débutant au XIXe siècle. Chaque génération est intelligemment replacée dans sa contemporanéité offrant un réel fond historique au propos. Des souvenirs de sa grand-mère lui contant la perte de son oncle à l’âge de 28 ans, exécuté par l’état dictatorial argentin d’alors, à ceux, plus personnels, d’une promenade dans les rues de Cordoba avec sa petite-amie Carina, en passant par les nains de jardin datant de la présidence péroniste, ou le débarquement des colons européens à l’aube de la seconde moitié du XIXe siècle, c’est un peu plus d’un siècle et demi d’histoire argentine que l’autrice nous propose de retracer au rythme de ces notes de bas de page. Celles-ci sont d’ailleurs complétées par des notes finales présentes en fin d’album, apportant des précisions au lecteur quant au contexte argentin suivant les époques, un travail d’adaptation à un lectorat français de la part de l’autrice et de la maison d’édition remarquable.

© éditions iLatina
© éditions iLatina

Nous aurions toutefois tort de ranger Notes de bas de page du côté de ces productions personnelles et intimistes, car derrière cette apparente autobiographie mettant l’accent sur la question de mémoire, surgit un message de paix et d’acceptation de l’autre, d’autant plus puissant qu’il est appuyé de tout son poids par l’historicité de la chronique familiale. Des Indiens massacrés à l’arrivée des colons européens en Amérique du Sud à l’orée des années 1850 et leur quasi-extinction qui en suivit, aux persécutions menées par les gouvernements argentins successifs en passant par l’actuelle crise migratoire érigeant l’Europe en Eldorado concomitamment à une montée des fascismes en son sein, les parallèles établis, de même que les intentions de l’artiste sont claires.

© éditions iLatina
© éditions iLatina

Le propos est à la fois ambitieux et riche, alors que, paradoxalement, Nacha fait attention à ne pas se perdre dans de trop longs dialogues. De cette volonté de ne pas trop en écrire naît un langage graphique évocateur dont le découpage accentue la capacité communicante en aménageant l’espace d’expression des illustrations. Mais de cette richesse ressort certaines fois une sorte de confusion que l’on mettra sur le dos d’un léger manque de maîtrise scénaristique dû à la jeunesse de l’autrice. Cela n’empiète toutefois pas sur les thèmes de fond portés par l’album, et les messages sont clairement transmis.

Le dessin est, quant à lui, foisonnant. Nacha semble être douée d’une rare versatilité face à sa planche. On trouve, au fil des pages, de nombreux styles différents, certains plus maîtrisés que d’autres, faisant que des planches peuvent parfois dénoter du reste de l’album. L’identité graphique de l’autrice n’est donc pas encore clairement définie et nous aurons à cœur de suivre son évolution tant le talent transpire de cette production. Pour les amateurs de dessin, un petit sketchbook est présenté en fin d’album.

L’une des rares pleine page de l’album
© éditions iLatina

Vous l’aurez compris, en dépit de sa jeunesse, Nacha Vollenweider ouvre, avec cet ouvrage, une nouvelle page de la bande dessinée argentine qui, espérons-le, connaîtra le renouveau dont les acteurs locaux se languissent. Malheureusement, la situation économique argentine n’étant pas au beau fixe, et les prévisions n’annonçant rien de très rassurant pour l’avenir, le secteur éditorial est, de manière générale, en berne. Il est donc indispensable que des organismes tel que les éditions iLatina parviennent à survivre du fait qu’ils permettent l’obtention d’espaces de libre expression et travaillent à accompagner et faire fructifier tout un pan de notre culture mondiale.

(par Thomas FIGUERES)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782491042011

Notes de bas de page - Par Nacha Vollenweider - Traduction : Thomas Dassance - Éditions iLatina - Sortie : 23 août 2019 - Prix : 20 euros

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- La BD sud-américaine à l’honneur aux éditions iLatina

 
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