Quinn Novak est le premier héros d’une nouvelle maison d’édition : "ABA Academy"

Ce qui est intéressant dans leur démarche, c’est leur volonté de ne pas brûler les étapes. De ne pas, tout de suite, vouloir tout faire en même temps ! Même si, au départ, leur idée était de permettre à la bande dessinée de sortir du seul domaine qui lui est réservé (édition, dédicaces, festivals…) en permettant des rencontres « différentes », en mêlant plusieurs réalités pour créer de l’événementiel, ils ont vite compris que, pour le moment, en cette période dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle est troublée et instable, il fallait d’abord faire de la bande dessinée.

Résolument belges tous les deux, ils ont cependant décidé de ne pas faire comme tout le monde, et d’éditer leurs albums en néerlandais et en français en même temps.

Et donc, voici leur premier livre édité. James Vandermeersch au scénario et Patrick Vanon au dessin ont créé un personnage classique, traditionnel, Quinn Novak. Patrick Vanon est un auteur flamand, qui a à son actif une adaptation des superbes romans policiers (et politiques) de Pieter Aspe, le commissaire Van In… J’ai toujours regretté de ne pas voir ces BD traduites en français… Tout comme je regrette que la traduction des romans en français se soit interrompue il y a déjà quelques années maintenant…

Son style est, incontestablement, classique, traditionnel… Je le rapprocherais, du côté flamand, des albums de chez Standaard qui ont modernisé des séries comme Suske en Wiske, ou De Rode Ridder. Du côté francophone, comme il le dit lui-même d’ailleurs, son influence est à trouver chez Daniel Hulet.

Quinn Novak est un photographe. Il entre en possession d’un dossier ancien qui parle du Graal, de Louis II de Bavière, de complots tout au long de l’histoire humaine. Aidé par une policière, il va se balader de château en château, de meurtre en étreintes amoureuses, de symbole en réalité, pour retrouver la trace de ce fameux Saint-Graal !

Le scénario mélange l’aventure, l’Histoire et l’ésotérisme, un peu à la manière du « Da Vinci Code ». Il balade le lecteur entre légende et réalité, se révélant, il faut le dire, convenu d’une part, et construit à partir de raccourcis parfois trop faciles. La construction narrative, en grande partie en dialogues, par contre, permet au dessin de prendre le pouvoir.

Et là, tout le plaisir du dessinateur apparaît, celui de mettre en scène des décors somptueux, des châteaux, des sous-bois, des paysages enneigés…
Vanon aime les contrastes, les ombres, les lumières, et son coloriste Sunil Ghagre permet de créer une ambiance essentielle à la bonne lecture de ce livre. Avec, de ci de là, d’autres influences que celle de Hulet… Les gros plans lumineux, par exemple, dont le traitement fait un peu penser à Servais…

Je pense que ce livre est intéressant, en partie grâce au dossier historique qui le termine et dont l’iconographie est bien choisie. Je pense aussi que le personnage principal est intéressant. Mais, en même temps, je crois qu’il faudra pour en faire un personnage « porteur » modifier le fil narratif, ancrer bien plus le récit dans la relation frontale d’une aventure…

C’est dire que j’attends de retrouver Quinn Novak plus mûr dans son ancrage dans la réalité, moins absent, en quelque sorte, d’un récit dans lequel il ne peut que gagner à y occuper une place plus centrale !

Souhaitons bonne vie à cette nouvelle maison d’édition, et souhaitons aux auteurs de trouver une efficacité accrue dès le prochain tome de cette nouvelle série !...