Ce n’est pas un virus, ni une conséquence des pollutions ou des risques biotechnologiques. Cette nouvelle maladie touche les amoureux. Qui s’aiment trop. Mais pas forcément sans se protéger. Elle atteint les vrais accros, ceux dont les sentiments sont forts, profonds, intenses, voire soudains. Et les conséquences semblent définitives : on reste immobilisé. Dans la même position qu’au moment ou ce choc émotionnel atteint son point culminant, irrépressible.
Face à un tel phénomène, la science se met sur le pied de guerre mais en est réduite à observer, impuissante, ces êtres pétrifiés, tout en constatant leur bonne santé physiologique. Pour Olga, journaliste lancée sur le scoop, le thème est d’autant plus fascinant que son couple, lui, n’a rien de passionné, alors qu’elle-même suscite de fortes attractions auprès d’un membre de sa rédaction, qui succombe à l’épidémie. La voilà mise à l’écart. Pire, avec d’autres -des femmes, seulement !- Olga doit porter un brassard distinctif, décoré d’un cœur... Quelle cruelle ironie, et quelle stigmatisation nauséabonde, qui rappelle d’autres époques...
Dans la foulée de son très romanesque L’Homme qui n’existait pas, Cyril Bonin va plus loin dans l’exploration du "syndrome" amoureux. Pour cela, il change de style : exit la couleur, place à un noir et blanc très sobre, assez sage, qui paraît destiné à renforcer l’aspect intemporel de l’histoire.
On trouve dans Amorostasia autant d’admiration envers les femmes que d’idéalisation de l’amour qui, dans cet album, atteint le même stade ultime que dans les classiques grecs. Grâce à un personnage secondaire, en marge et plutôt opportuniste, le récit va crescendo vers un final d’un immense élan romantique. Suffisamment réussi pour balayer les rares longueurs et scènes redondantes de cette belle déclaration dessinée.
(par David TAUGIS)
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