Après un premier tome consacré au Countdown to Infinite Crisis et au Projet Omac, faisant la part belle au travail de Greg Rucka sur cette Crise, ce deuxième volume nous présente Rann-Thanagar War de Dave Gibbons et Villains United de Gail Simone. Deux épisodes d’Action Comics, par cette dernière, effectuant la jonction entre les deux récits ou plutôt introduisant le second.
Rann-Thanagar War nous entraîne aux confins de la galaxie, sur la planète Rann, défendue par le Terrien Adam Strange. Rann, à la technologie avancée, doit faire face à la crise qui touche son belliqueux voisin, Thanagar, patrie de Hawkman, Hawkwoman et Hawkgirl, des guerriers s’appuyant sur la puissance du métal N. Déplacée dans l’orbite de Thanagar, Rann précipite cette dernière vers son soleil. La population de Thanagar se voit évacuée vers Rann... Débute alors un conflit amplifié par le réveil d’une divinité thanagarienne.
Combats cosmiques, interventions des Green Lantern, de la L.E.G.I.O.N. et de Captain Comet, assauts désespérés, monstre dévoreur de mondes : l’action continue de Rann-Thanagar War, ses péripéties tragiques, ses bassesses politiques, la grandeur de ses héros et sa dimension épique sidérale sont là pour annoncer ce que sera la Crise elle-même que cette aventure préfigure avec un casting "secondaire" aux enjeux encore limités.
Divertissant et sympathique, proposant quelques développements assez forts, notamment autour des héros de Thanagar, ce premier récit manque cependant de souffle et de profondeur. Les amateurs de space opera y trouveront certainement leur compte, les autres moins. Mais que ceux-ci se rassurent : Villains United, en revanche, est une formidable réussite qui devrait mettre tout le monde d’accord.
L’aventure imaginée par Gail Simone fonctionne d’abord comme un trompe-l’œil. Si son titre annonce la constitution de la Société rassemblant tous les super-vilains de la planète, lancée par Lex Luthor et dirigée par un collège des pires criminels qui soient (Thalia Al Ghul, Deadstroke, Dr. Psycho, Black Adam et le Calculateur), l’histoire se noue en fait autour d’un autre groupe de six vilains, marginaux parmi les parias, miroir brisé et inversé des six nouveaux leaders du crime : les Secret Six.
Reprenant le concept d’une équipe inventée durant l’Âge d’Argent, Gail Simone construit l’un des meilleurs groupes de personnages de comics qui nous ait été donné de lire. Sous la houlette d’un mystérieux Mockingbird qui les tient autant qu’il les protège, les Secret Six vont se dresser seuls contre la mise au pas des vilains orchestrée par la Société de Luthor.
Constitué à la fois de figures démodées du monde des super-vilains, de véritables bras cassés, d’illustres inconnus ou même de personnages en apparence génériques, ce groupe prend tout de même et mystérieusement vie à travers les riches personnalités de ces anti-héros et les interactions qu’ils développent et entretiennent, leurs désirs singuliers devant composer avec la logique collective, leurs intérêts individuels se heurtant aux impératifs de l’équipe.
Cette sorte d’Escadron Suicide, purement inscrit dans l’univers des vilains, rassemble donc en premier lieu quelques figures connues : Cheschire d’abord, ennemie des Titans, Deadshot ensuite, auquel Urban Comics a consacré un volume de sa collection Nemesis. Gail Simone y ajoute des personnages de son cru, dans la filiation d’autres vilains un peu oubliés : il en est ainsi de Scandale Savage, fille de Vandal Savage, et d’un nouveau Ragdoll, fils honni du premier et historique Ragdoll. La scénariste adjoint à la fine équipe un paradémon, troupe de choc de Darkseid, ayant échappé à l’influence de Mamie Bonheur.
Enfin, le sixième membre, venu en remplacement du Violoneux, constitue le véritable héros de ce récit et recycle l’un des plus lamentables adversaire de Batman : Catman. L’amateur de félins vit là une seconde jeunesse et, à l’instar de Deadshot, ouvre une réflexion sur les valeurs véhiculées et respectées par héros et vilains.
Après les fautes commises par les héros lors de Crise d’Identité et The OMAC Project, la frontière, parfois ténue, entre héros, anti-héros et véritable vilains se brouille encore davantage. Et c’est sur cette zone d’ombre qu’un personnage comme Catman fait lumière, dans un récit globalement violent, dur, mais finalement touchant et émouvant car faisant la part belle à la passion dans les motivations de ses personnages.
Formidable fresque sur le monde secret des criminels de la planète, passant en revue un personnel pléthorique superbement réinvesti et mis en scène, Vilains United offre un récit remarquable à côté duquel on ne saurait passer. En espérant qu’Urban Comics, comme nous le suggérait François Hercouët l’an dernier, poursuive la publication des aventures des Secret Six dans un volume de la collection Nemesis par exemple.
(par Aurélien Pigeat)
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Infinite Crisis T2, Unis pour le pire. Collectif. Traduction Edmond Tourriol. Urban Comics, collection "DC Classiques". Sortie le 27 février 2015. 352 pages. 28 euros.
Contient :
Rann-Thanagar War #1-6 : Dave Gibbons (scénario) ; Ivan Reiss (dessin)
Action Comics #830-831 : Gail Simone (scénario) ; John Byrne (dessin)
Villains United #1-6 : Gail Simone (scénario) ; Dale Eaglesham (dessin)
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