[Lucie Lomová, vous venez de terminer votre dessin dans le cadre du Musée dessiné pour la saison de la BD 2023 du Lyon BD festival. L’expérience consiste à réaliser en 2h30 une planche de dessins sur chevalet dans la salle où se trouve une œuvre qui vous sert d’inspiration. Est-ce que dessiner en direct et devant un public est quelque chose de facile pour vous ?
Ce type d’exercice me plaît beaucoup car j’aime voir comment les gens réagissent à mon dessin au fur et à mesure que je le réalise. Je suis aussi adepte de l’improvisation. Le fait d’avoir une deadline est également très motivant même si, je dois bien l’avouer, j’ai dépassé la mienne de quelques heures !
Comment vous est venue l’idée du thème de votre dessin réalisé pour Lyon BD ?
J’avais entendu quelques temps auparavant une interview d’Oksana Zabusko, une femme de lettres et poétesse ukrainienne qui a vécu Tchernobyl et en parlait de façon très poignante. J’avais donc cette idée d’illustrer ce discours d’Oksana avec une œuvre qui serait présente dans le Musée des Beaux-Arts de Lyon.
Je préfère la peinture, donc je me suis naturellement tournée vers ce support pendant mes recherches sur le site web du musée. Mais j’ai alors pensé à combiner le texte de Zabuzko avec plusieurs statues de Vierge à l’enfant qui disparaissent au loin, à moitié inondées d’eau. Puis, j’ai modifié mon idée.
C’est lors de ma visite de repérage physique que j’ai vu La Dormition de la vierge (NDLR : statue en bois polychrome d’un auteur anonyme réalisé en Espagne au XVIe siècle), et que j’ai su que ce serait mon modèle. Cette vision d’un corps allongé, comme suspendu ou flottant au-dessus des eaux rendait bien la dimension divine et humaine que je voulais insuffler à mon dessin.
D’où vient votre inspiration habituellement ?
Tous les sujets peuvent m’inspirer, je n’ai pas vraiment de ligne précise à ce niveau-là. Il y a quelques années, dans une phase un peu plus sombre de ma vie, j’ai eu envie de faire une expérience consistant à réaliser une esquisse tous les jours, comme un journal intime dessiné. L’idée n’était pas de représenter les moments importants ou significatifs de ma vie mais juste n’importe quoi, ce que j’avais envie de dessiner sur le moment. Cette expérience artistique a été libératrice car j’ai pu la faire sans pression particulière. Elle m’a permis d’acquérir plus de confiance en moi, ce qui facilite aujourd’hui mon travail.
Entre la BD jeunesse avec Anca et Pepik (Dupuis), le roman d’aventures Anna en cavale ou encore Les Sauvages (chez Actes Sud / L’An 2à qui est inspiré d’une histoire vraie, vous avez produit des œuvres assez différentes. Quelle a été la plus difficile à réaliser ?
Sans hésiter, je dirai Sortie des artistes car j’ai compris en construisant cette BD que les enquêtes policières sont très difficiles à écrire.
En effet, en tant qu’autrice de ce genre de BD, il faut tout savoir de l’histoire dans les moindres détails pour pouvoir surprendre le lecteur qui lui ne sait rien de l’enquête. Les enquêtes policières c’est comme des mathématiques : il faut tout savoir avant pour que le lecteur ne sache rien.
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Je suis en train de terminer une BD autobiographique sur l’année de mon enfance que j’ai passée à Chicago entre 1969 et 1970, un an après que la Tchécoslovaquie ait été envahie par l’URSS. Mon père était un scientifique qui a travaillé pendant plus d’un an en tant que scientifique à l’université aux USA, mais lorsque son permis a expiré, mes parents ont décidé de retourner en Tchécoslovaquie. Je ne sais pas quand elle sera terminée mais j’ai à peu près une soixantaine de pages faites et un éditeur tchèque et un Français sont partants pour la publier.
(par Gaëlle BEDIS)
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