Madame désire ? - Par Grégory Mardon - Dynamite

Après avoir effleuré le genre dans ses précédents albums ou par le biais d’un site collectif, Grégory Mardon sautait le pas de l’érotique en 2009 avec Madame désire ? via le fugace label de Fluide Glamour. Ce délicieux récit corrosif utilisait l’été 1936 et les premiers congés payés pour livrer au lecteur un savoureux vaudeville opposant les classes sociales.

On y retrouve Simon et Anatole qui sillonnent la province en vélo. Tiens ! Léon Blum et son gouvernement viennent d’accorder les premiers congés payés, et nos deux amis sont bien décidés à en profiter. Mais à force de rêver leur liberté, les deux cyclistes se sont trop éloignés de la civilisation, jusqu’à tomber par heureux hasard sur un manoir. Là, on les accueille à bras ouverts ! Et pour cause, on les prend pour deux domestiques engagés et envoyés par le maître de maison, actuellement en déplacement.

Content de trouver un toit et un repas, Simon et Anatole décident de profiter un peu de la situation, surtout les mœurs de la maison semblent assez portées sur la gaudriole. Le maître parti, les souris dansent : la femme de chambre semble férue de pratiques plus que légères ; sa fille affiche un air mutin sans équivoque ; signalons aussi "Madame", une maîtresse autoritaire qui compte se faire obéir à l’œil et au doigt. Tout serait parfait si Monsieur ne revenait pas plus tôt que prévu...

Le retour de Grégory Mardon au récit érotique avec Amour cru en 2022 chez Glénat présentait une belle opportunité de rééditer ce récit de 2009 difficilement trouvable en seconde main. Comme à son habitude, La Musardine ne se contente pas de simplement rééditer l’ouvrage, l’histoire est non seulement mise en couleurs par l’auteur lui-même, mais Mardon a d’ailleurs réalisé quelques retouches çà et là, histoire de parfaire l’objet. On retrouve notamment quatre illustrations inédites en album dans un cahier complémentaire venant clôturer en beauté ce récit des plus inspirés.

En effet, si Madame Désire ? surfe sur les clichés des relations d’une maisonnée, tout en alignant toutes les positions sexuelles que l’on pourrait attendre dans ce registre, l’ensemble du récit se présente avec une remarquable aisance. On ne ressent aucune situation forcée pour la bonne et simple raison que Mardon se limite souvent à un aspect plus érotique que pornographique. L’histoire s’en trouve bonifiée car on s’intéresse d’autant plus aux personnages et aux situations qui bondissent d’une séquence à l’autre avec un plaisir non dissimulé. Surtout que certains arrière-plans apparemment anodins recèlent un second degré carrément frivole. Les couleurs posées par l’auteur confortent un noir et blanc déjà splendide, conférant à l’enseemble une lisibilité accrue.

Dans cette période caniculaire qui s’achève, nous ne pouvons que vous conseiller de "fondre" pour Madame désire ? : les protagonistes se frôlent et s’effleurent dans une atmosphère aussi chaude que ce que nous avons vécu, non sans se départir d’une certaine classe, d’un humour et d’une sensualité qui manquaient parfois à quelques albums plus crus du genre. Voici une seconde occasion d’en profiter. Cette fois, ne loupez pas le coche !