Au cœur de l’intrigue, Miss Nathansen, dactylo de son état à la 2e brigade de police de Nytory, dont le chef enquête sur ces meurtres. Elle est issue d’une bonne famille juive bourgeoise de la ville. Son chef a dans l’idée de l’envoyer en mission dans le quartier très fermé occupé par ses coreligionnaires (très peu parlent le danois) pour recueillir des informations sur ces meurtres. Avançant dans ce qui n’est pas une investigation officielle, Miss Nathansen découvre que ceux-ci ont une signification kabbalistique, ce qui signifie que « le monstre » est donc juif, ce qui risque de jeter l’opprobre sur toute la communauté...
Chemin faisant, elle découvre une pègre juive qui organise la prostitution des jeunes femmes juives esseulées, un fructeueux commerce, ce qui restreint le spectre des investigations…
Cet album est une bonne surprise. Réalisé par deux auteurs danois, le premier pour ses romans d’horreur, Benni Bødker, le second par Christian Højgaard, un dessinateur habile dans le traitement du noir et blanc au pinceau, ce qui donne des pages dynamiques, bien rythmées, et souvent spectaculaires. La surprise vient de la qualité des références avancées par notre duo d’auteurs.
Le traitement de la vie juive au Danemark, celui d’une enquête qui se déploie en suivant le schéma de l’arbre séfirotique de la Kabbale, tout cela est correctement documenté et bien traduit, notamment dans son usage du yiddish, par Philippe Touboul. On est un peu plus dubitatifs sur l’usage du mot « ghetto » pour parler du quartier juif de Copenhagen (qui n’avait rien d’un quartier fermé) et pour une prémonition de la Shoah dont on sait qu’elle affecta peu la communauté juive danoise : les quelque 7 200 Juifs des pays scandinaves occupés par les nazis ont pu s’échapper vers la Suède neutre et ils ont peu été spoliés. Seuls 51 Juifs du Danemark ont péri pendant l’occupation nazie, une exception européenne.
Mais l’album est néanmoins d’excellente facture, offrant une intrigue bien ficelée au dessin tout à fait exceptionnel.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Meschugge – Le Labyrinthe du fou – Par Benni Bødker et Christian Højgaard – Traduction de Philippe Touboul - 19,8 x 26,6 cm, 144 pages. Ed. Glénat