Brûlantes ! - Par Mô - Dynamite (La Musardine)

Quelque part en Chine, en des temps immémoriaux, le poète Luo tombe fou amoureux d’une femme-renarde. Un amour impossible et contre-nature qui le mène sur les chemins de l’illégalité, jusqu’à causer sa perte.

Lancés sur les traces de l’étrange créature, aussi sensuelle que dangereuse, le censeur Qiu et son fidèle acolyte enquêtent. Des faubourgs crapuleux aux palais monumentaux de la Chine ancienne, où se jouent tous les drames humains, un monde d’érotisme et de métamorphoses divines s’ouvre à eux...

Après Le Pilier du ciel dans lequel Mô explorait déjà l’histoire chinoise sur le ton de l’érotisme et de l’humour, cet auteur assez secret remet le couvert avec Brûlantes ! Mis-à-part un manchot qui est finalement loin de l’être, la thématique s’est distanciée de l’humour pour présenter une enquête assez étrange : prisonnier de ses rêves, un censeur poursuit des femmes-renardes, à savoir des créatures issues du domaine des dieux et qui tentent de renouer avec l’immortalité en aspirant la semence des hommes.

Dans la bande dessinée érotique, le concept de la femme qui profite des hommes pour leur soutirer leur liquide séminal n’est pas vraiment neuf. On pense notamment à Manara, dont les mises en page de Mô s’inspirent sans doute, notamment du Singe. La comparaison s’arrête rapidement, car l’auteur de Brûlantes ne parvient toujours pas à allier graphisme et action. Ces approximations ne gênent pas du tout la lecture et tendent d’ailleurs à se réduire au fur et à mesure de la progression du récit, comme si l’auteur apprenait chemin faisant au gré des pages.

Le scénario ne nous laisse également pas insensible, tout d’abord car cette plongée dans la société chinoise est vraiment intéressante, surtout en raison de l’utilisation du mythe de la femme-renarde pour aborder deux thématiques passionnantes : celui de la femme libérée qui trace son chemin (celle qu’on appelle en taoïsme la Tigresse blanche, voir la série de Yann & Conrad) ; de l’autre la pratique sexuelle du taoïsme qui conseille de réfréner son éjaculation pour améliorer sa santé et augmenter son plaisir.

Le petit bémol du récit réside dans la caractérisation des personnages. Une bonne dizaine de protagonistes sont présentés au gré des pages, et comme les femmes changent parfois de coiffure, il n’est pas toujours facile de bien situer qui intervient... surtout que certaines personnages répondent à deux prénoms ! Ces ambiguïtés se retrouvent surtout dans la seconde partie de ce long récit de 64 planches, heureusement contrebalancées par la montée en puissance du graphisme (on apprécie surtout le travail sur les masses noires).

Au final, Brûlantes ! remplit les attentes d’un lectorat avide de lectures érotiques mais aussi historiques. Un véritable moment de bande dessinée qui incite, après la lecture, à chercher à en savoir plus sur le taoïsme sexuel.