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"Evol" : Atsushi Kaneko, punk dans l’âme

Par Jaime Bonkowski de Passos le 16 mai 2023                      Lien  
On le connaît pour "Deathco", "Soil", "Wet-Moon", "Bambi", Atsushi Kaneko est de retour en librairie avec "Evol", sa dernière série aux allures de block-buster, mais qui conserve toute l'acidité caractéristique de son auteur.

Dans un monde peuplé par des "supers", des être dotés de pouvoirs surpuissants qui se transmettent leurs facultés par le sang, un trio de jeunes adolescents brisés par la vie se retrouve mystérieusement propulsé au sein de cette étrange communauté, sans que rien ne les y prédestine.

Que faire de leurs nouveaux pouvoirs ? C’est la grande question à laquelle ils devront trouver une réponse, coûte que coûte.

Un maître en état de grâce

Moitié du crâne rasé, tatouages dépassant de ses biceps sous un teeshirt serré noir : Atsushi Kaneko tire sur la soixantaine mais garde l’apparence désinvolte d’un vrai punk dans la vingtaine. C’est sous ces apparats qu’il s’est livré à une superbe masterclasse au Festival du Livre de Paris, ActuaBD vous la raconte juste ici.

L’auteur (dont la réputation n’est plus à faire en témoignent la salle comble et l’engouement suscité par l’annonce de ses rares et précieuses dédicaces), était invité par son éditeur français Delcourt / Tonkam à l’occasion de la sortie d’Evol, sa dernière série. Publiée dans une controversée [1] Perfect Edition vaguement classieuse, cette nouvelle série est l’occasion, une fois de plus, d’apprécier la verve insolente et le trait virtuose d’un auteur dont l’oeuvre est aussi singulière qu’exceptionnelle.

"Evol" : Atsushi Kaneko, punk dans l'âme

© Kurokawa / Delcourt / Tonkam

Singulière car, il l’expliquait dans sa masterclasse, Kaneko n’a jamais adopté les méthodes traditionnelles d’écriture du manga. Il travaille à son rythme et surtout seul, sans assistant. La faute, dit-il, à un style trop personnel, qu’il est le seul à maîtriser. Ce style justement participe énormément à la singularisation de l’auteur dans le paysage manga-esque contemporain.

Inspiré par Paul Pope, les comics et la tradition des illustrations de pochette d’albums punk, son trait est épais, sa ligne est nette dans un noir et blanc sans nuance de gris, et ses chara-design empruntent plus au comix qu’aux styles plus aérés de ses compatriotes.

Dans Evol, ce style si personnel est mis au service d’une intrigue qu’il qualifie lui-même de plus "commerciale" que le reste de son oeuvre. On y découvre des super-héros (revisités à la sauce Kaneko bien sûr), un thème qu’il admet avoir choisit pour sa popularité grandissante, porté par des séries comme My Hero Academia et One Punch Man. Néanmoins, sa réinterprétation des héros à cape se fait au prisme de la déconstruction plutôt que de la glorification (là voilà, la fameuse "sauce Kaneko").

© Kurokawa / Delcourt / Tonkam
© Kurokawa / Delcourt / Tonkam

Ses trois personnages principaux se présentent donc au lecteur comme des aspirants au suicide. Motivés par des traumas personnels assez horribles, chacun attente à sa vie avec l’espoir d’en finir, pour réaliser, un peu déçus, qu’ils ont échoué. Et qu’au passage, ils ont été doté pour une obscure raison de supers pouvoirs, à charge pour eux de décider quoi en faire.

Le résumé est clair : on est face à une série sans concession qui embrasse des thèmes difficiles voire insoutenables.

Atsushi Kaneko au Festival du Livre de Paris en avril 2023
Photo : D. Pasamonik (L’Agence BD)

Un édition controversée

Si la qualité de la série est indéniable -notamment l’excellente traduction de Sébastien Ludmann- et suffit à motiver l’acte d’achat pour la plupart des amateurs de l’artiste, reste que le travail éditorial proposé ne fait pas que des heureux. Sur les réseaux sociaux, cela fait maintenant plusieurs mois que l’on épingle des rééditions jugées trop chères, quelquefois garnies de coquilles, souffrant d’une fabrication peu qualitative (papier trop fin, encre baveuse, etc), disparition de pages couleurs...

Pour Evol, le constat est semblable. Certes, la série est superbe, et l’auteur y déploie, une fois de plus, un authentique génie, mais 19€99 par tome (soit 40€ en caisse pour l’achat des deux parus simultanément), c’est difficile à avaler.

Ajoutons à cela plusieurs couacs lors de la distribution des tickets dédicaces de l’auteur en marge du Festival du Livre et les réseaux grognent...

Reste qu’Evol s’impose comme une des sorties hors-mainstream les plus importantes de l’année et une véritable consécration pour l’auteur. Ses lecteurs, présents en nombre aux différentes apparitions de l’auteur au cours du mois d’avril, ont démontré une fois de plus leur attachement à un artiste vraiment punk mais vraiment bon, qui mérite toute la gloire et les paillettes. Ceci dit, pas sûr que ça lui plairait tant que ça...

(par Jaime Bonkowski de Passos)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782413048176

"Evol" - par Astushi Kaneko - Delcourt / Tonkam - Traduction de Sébastien Ludmann - Parution : 12.04.2023 - 272 pages - 19€99.

[1on en reparle

Delcourt Super-héros Action Drame Fantastique
 
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