Romans Graphiques

#J’Accuse - Par Jean Dytar - Delcourt

Par Charles-Louis Detournay le 7 décembre 2021                      Lien  
Réflexion sur les médias actuels à travers le prisme d'une des plus célèbres affaires judiciaires de France, "#J'Accuse" impressionne par le travail encyclopédique réalisé par Jean Dytar. Une excellente idée de cadeau pour les fêtes !

Chaque album de Jean Dytar recèle un univers à part entière ! Non seulement car l’auteur se réinvente à chaque reprise, mais aussi parce qu’il parvient à faire correspondre la forme au fond d’une manière aussi originale que graphique. Après des réussites comme La Vision de Bacchus ou le plus récent Florida, il nous tardait de savoir quel nouveau tour de force il allait nous réserver. Et, une fois de plus, nous sommes sous le charme !

La première réussite n’est autre que le livre-objet en lui-même. Comme présenté ci-dessus, auteur et éditeur ont imaginé un coffret rigide qui accompagne ce livre de 312 pages. Dès l’ouverture, on comprend que le contemporain va se mêler à l’ancien tout au long de notre lecture. Tout d’abord avec l’anachronisme entre le faux clavier de machine à écrire et l’approche électronique des premières pages. Puis surtout grâce au petit carton qui renferme le mode d’emploi du livre, et nous invite surtout à scanner certaines pages de l’ouvrage via l’application Delcourt-Soleil afin de découvrir du contenu complémentaire, comme les journaux originaux qui évoquèrent la fameuse affaire Dreyfus.

Comme le célèbre titre de l’article d’Émile Zola l’indique, Jean Dytar a effectivement consacré cette imposante étude à l’affaire qui secoua la France à la fin du XIXe siècle. Nous sommes nombreux à en connaître les grandes lignes : le document qui incrimina le militaire pour espionnage et trahison, le procès inique, l’atmosphère antisémite, les campagnes de presse, les « pour » et « contre » qui s’affrontèrent jusqu’à diviser des familles, puis la grâce et la réhabilitation. Mais qui connaît réellement l’ensemble des détails, et surtout quel aurait été notre point de vue à l’époque ? Voilà le double premier objectif suivi par Jean Dytar, qui a agencé et mis en page ces témoignages d’époque. Car l’auteur n’a pas écrit une ligne de l’album au sens propre, comme il l’explique ci-dessous :

Là où Jean Dytar innove une fois de plus, c’est dans la forme choisie. Car les pages de son album donnent le sentiment d’une longue recherche chronologique de tous les éléments que l’on pourrait retrouver sur Internet si ces faits avaient été contemporains. Le format oblong prend donc la forme d’un écran d’ordinateur où l’on découvre des articles de presse, où l’on suit des reportages réalisés par des journalistes micro à la main, où l’on lit les blogs ou les comptes des réseaux sociaux des principaux concernés, et où l’on visionne les vidéos de leurs interviews. C’est au nom de cette transposition aux moyens de communication modernes que l’auteur a rajouté le # devant J’Accuse.

L’avantage de cette présentation saute tout d’abord aux yeux : le contenu est ultra-abordable pour les lecteurs du XXIe siècle que nous sommes, et la grande variété de mises en pages permet de maintenir l’attention malgré l’imposante taille de l’ouvrage et la multitude de documents qu’il contient.

#J'Accuse - Par Jean Dytar - Delcourt

Les pages 7, 8, 9 de l’ouvrage démontrent les variations au sein des différents modes de présentation
La source des références utilisées se trouve dans la barre supérieure, comme au sein d’un moteur de recherche.

De plus, ce parti pris peut ouvrir d’autres champs de réflexions, au-delà de l’intérêt que revêt l’Affaire Dreyfus en elle-même : les contemporains avaient-ils accès à toutes ces informations en temps réel, comme nous ? Certains d’entre eux ne tronquaient-ils pas leur jugement en ne lisant que certains journaux qui avaient clairement choisi leur camp ? Et le fait de ne lire que des réseaux sociaux où les opinions s’étalent ne nous éloigne-t-il pas d’une information plus générale et impartiale, nous privant malgré nous d’une part de notre libre-arbitre ?

Que cela soit dans la compilation de toutes ces informations de l’Affaire Dreyfus et les remous qu’elle a générés, ou dans le traitement novateur de sa présentation, #J’Accuse est certainement l’un des immanquables de cette fin d’année. Un ouvrage qu’on ne lit toutefois pas d’un seul tenant, vue l’impressionnante quantité d’informations rassemblées par Jean Dytar. Dès lors, le petit carton présentant l’approche multimédia peut devenir un marque-page très utile. De quoi démontrer encore que le futur éclaire le passé, et vice-versa.

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782413015864

#J’Accuse. Par Jean Dytar (scénario et dessin). Delcourt. Collection "Mirages". Sortie le 01/09/2021. 21 x 27 cm. 312 pages. 29,95 €.

Découvrir quelques-uns des précédents albums de Jean Dytar, tous aux Editions Delcourt :
- Les Tableaux de l’ombre avec cette interview : l’Art, l’air de rien
- Florida
- une autre interview : "Je ne cherche pas à produire un récit historique à proprement parler, mais quelque chose de romanesque, aux résonnances intimes et universelles"
- "La Vision de Bacchus" et les secrets de la Renaissance italienne

Toutes les illustrations sont : © Éditions Delcourt, 2021 - Dytar.

Delcourt ✍ Jean Dytar ✏️ Jean Dytar à partir de 13 ans Histoire France
 
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