« Comment faire de Paris un faubourg de Bruxelles ? » Le peintre romantique Antoine Wiertz (1806-1865), ulcéré par l’accueil qui lui était fait par la capitale française, avait imaginé, dans un schéma que l’on peut voir derrière une porte de son atelier-musée bruxellois, construire une maison tous les trois-cents mètres afin de créer une conurbation qui englobe Paris comme un vulgaire faubourg. Il y a de cette démesure et de cette utopie dans les travaux de Schuiten et Peeters. Nous sommes souvent dans un processus de surgissement : une structure d’origine inconnue, des bâtiments aux logiques autonomes concrétisent des exosquelettes d’une pensée utopique qui, naïve et obscure, comme celle de Wiertz, accoucha cependant du monde moderne.
La théorie du grain de sable ne procède pas autrement : à cause d’un acte irresponsable posé par l’homme, Brüsel est cette fois envahie par le sable et par les pierres, tandis que certains citoyens en perdent leur gravité. Comment ? Pourquoi ? Telles sont les questionnements qui interrogent la malédiction. Le bourgmestre Sleeckx ne sait où donner de la tête devant ces catastrophes qui n’ont vraiment rien de naturel. Entamé dans un climat de fin du monde digne de L’Étoile mystérieuse, le récit se déploie comme dans un roman de Jules Verne avec une mission de savants envoyés au bout du monde pour résoudre une énigme venue d’une civilisation méconnue.
En forme de parabole, cette Théorie du grain de sable où l’on imagine que les auteurs apportent leur tribut à la réflexion sur les conséquences et les origines des évènements du 11-Septembre, est autant fascinée par les utopies qu’inquiété par leur dangerosité. Un album exemplaire des Cités obscures.
L’objet est curieux et inédit. Imprimé en bichromie, l’album est au format italien, glissé dans un étui. Une forme assez rare dans la production francophone.
Le centre Wallonie-Bruxelles à Paris envahi par les pierres et le sable
Comme pour prolonger la malédiction jusque dans sa représentation culturelle à Paris, le Centre Wallonie-Bruxelles, les auteurs ont imaginé son immeuble qui fait face à Beaubourg, envahi par les cailloux et le sable.
Présentant depuis le 15 septembre des dessins originaux de l’album, plus un bon nombre d’inédits rejoignant ses thèmes, François Schuiten et Benoît Peeters ont réussi, avec l’aide de l’atelier scénographique Bleu Lumière, une installation dotée d’un éclairage et d’un espace sonore originaux. À voir jusqu’au 2 novembre.
Troisième festival « De la Bulle à l’écran »
Autre manifestation au Centre Wallonie-Bruxelles dans le contexte de la publication de cet album-évènement, mais du 15 au 20 septembre cette fois : le 3ème Festival de la Bulle à l’écran qui met en avant une programmation de cinéma conçue par Louis Héliot (avec la complicité de Peeters et de Schuiten).
Elle présente les films qu’ils ont réalisés ou sur lesquels ils ont travaillé, ensemble ou séparément, de même que ceux qui les ont inspirés pour la création des Cités obscures.
On ne sera pas étonné que les œuvres de Raoul Servais, l’une des grandes inspirations de Schuiten, ni Toto le héros de Jaco Van Dormael qui sera présenté au public le samedi 20/9 par Schuiten lui-même. De même, un documentaire de Benoit Peeters à propos de l’œuvre de Hergé, ou encore Le procès d’Orson Welles d’après Kafka. Quelques belles soirées en perspective.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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