Valmont reprend assez scrupuleusement la trame des Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. Merteuil compte se venger de son ancien amant Gercourt en pervertissant la jeune Cécile - à peine sortie du couvent - qui lui est promise, tandis que Valmont se fait un devoir de conquérir la prude Mme de Tourvel. Complices puis adversaires, les deux libertins se livrent à un jeu de massacre jubilatoire où la correspondance tient un rôle central.
Adapter ce roman, c’est donc se heurter à la mise en scène d’un récit épistolaire. Chiho Saito s’en sort remarquablement en insérant de très nombreux passages directement repris du texte d’origine, illustrés par quelques planches ou cases. L’action avance ainsi par tableaux successifs, use de l’ellipse et de la suggestion, et développe par endroits certaines scènes-clef où l’émotion affleure de manière plus intense.
Certains pourraient trouver que l’ensemble manque du coup de rythme, du fait du poids des textes - échanges et pensées des personnages - mais cela nous semble justement une des grandes qualités du titre. Le style, qui relève clairement du shojo par le mode de narration et le graphisme adoptés, permet de retranscrire assez efficacement les passions décrites dans le roman original.
On notera les libertés prises par la mangaka avec la source, témoignant de choix de mises en scène réfléchis et intéressants. Ainsi, elle rapproche l’action de la Révolution Française, pour discrètement colorer socialement son histoire, et donne des prénoms - signifiants ! - aux personnages pour créer une intimité entre eux lors des scènes de confrontation.
Si ce manga ne relève pas de la collection des Classiques en manga de l’éditeur, et ne bénéficie pas de son exposition, il propose un adaptation intelligente et sensible du chef-d’œuvre de Laclos.
(par Aurélien Pigeat)
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