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Boy’s Abyss T. 3 – Par Ryo Minenami – Kana

Par Malgorzata Natanek le 28 mars 2023                      Lien  
Après sa tentative de suicide échouée, Reiji se retrouve sous l’emprise de sa professeure qui lui promet de l’aider contre des faveurs sexuelles. De son côté, son amie d'enfance Tchako doit faire face à une série de nouvelles désagréables. Une suite qui s’attarde sur le point de vue de la jeune fille qui connait un vrai mal-être.

Reiji poursuit sa relation malsaine avec son enseignante dans l’espoir de pouvoir quitter la ville grâce à elle. Tchako revoit son romancier préféré Kôsaku Esemori qui est loin d’être ce qu’elle aurait cru. Elle subit désillusion sur désillusion, nous révélant ainsi ses pensées noires. Ce développement remet en question la relation entre Reiji et Tchako tout en dévoilant un évènement lugubre du passé du romancier, qui exerce une influence néfaste sur son entourage. Les différentes intrigues et sentiments se croisent.

Les choix esthétiques et de mises en scène contribuent grandement à l’atmosphère lourde et malaisante. Les planches très sombres et les découpages des pages transmettent tantôt le sentiment d’oppression et de désespoir, tantôt le sentiment d’espoir ressenti par les personnages. L’ensemble colle parfaitement aux thématiques sérieuses abordées par l’auteur.

Boy's Abyss T. 3 – Par Ryo Minenami – Kana
Boy’s Abyss planche
©Ryo Minenami /Kana éditions

Même si certains instants donnent l’espoir d’un échappatoire, ceux-ci sont enlevés juste après pour nous ramener à la triste réalité accentuant l’aspect déprimant et sans issue de la situation. Ryo Minenami joue entre ces moments, plongeant encore plus dans les abysses le personnage et le lecteur par la même occasion. Dans ce tome, le héros n’est pas le seul à subir ces revirements puisque son ami d’enfance Tchako en fait également les frais.

Boy’s Abyss planche
©Ryo Minenami /Kana éditions

En effet, cette jeune fille qui apparaissait comme souriante et positive s’avère prisonnière de ses démons. Des signes avant-coureurs montraient son manque d’estime mais c’est ce troisième volume qui révèle réellement l’ampleur de ses pensées négatives et de sa psychologie. Tchako déteste son physique car elle se sent trop grosse et indigne d’être aimée par un homme. Elle ne s’aime pas et est persuadée que ce serait un miracle si quelqu’un voulait être avec elle. Un mal-être amplifié par son père qui veut qu’elle « ramène un gendre » pour le remercier de la soutenir. Elle représente très bien ces filles complexées à cause des standards de beauté et de la pression qu’elles vivent pour trouver quelqu’un.

Boy’s Abyss planche
©Ryo Minenami /Kana éditions

Le désespoir que dégage la ville où se déroule l’histoire accompagne également l’ambiance de l’œuvre. Un endroit perdu à la campagne qui laisse peu de perspectives pour les jeunes qui essaient tant bien que mal de quitter ce lieu dépressif. Une sorte de huit clos où tout le monde se connait ce qui n’aide pas à échapper à des relations toxiques. Les habitants sont prisonniers de cet espace et le scénario suggère qu’il est impossible d’en sortir.

Effectivement, Reiji est loin d’être le seul à se confronter à des obstacles pour partir. Son amie qui devait déménager pour Tokyo est rattrapée par cette réalité, ce qui fait ressortir toute sa négativité. Si elle semblait plus lumineuse, ce serait donc dû à cette promesse de changer de vie. Finalement, est-ce que ce lieu n’est pas la principale source de pessimisme pour les habitants ?

En plus, le héros n’est pas le seul à chercher auprès des autres un moyen d’être secouru. Chaque personnage introduit aspire à trouver une façon d’être sauvé. Cet ensemble amplifie la thématique principale qui se dégage du récit : l’abus psychologique et physique sur les mineurs. Tous les adultes qui sont apparus essaient de profiter de Reiji ou Tchako pour leur besoin.

Boy’s Abyss planche
©Ryo Minenami /Kana éditions

Que ce soit la mère du protagoniste qui torture psychologiquement son fils pour rester, l’enseignante qui couche avec son élève contre la promesse de l’aider ou bien le romancier qui tente d’influencer Tchako en lui faisant des propositions indécentes, ils exercent tous une pression psychologique sur ces lycéens. L’impuissance de ces jeunes va au-delà des paroles puisque les adultes gardent le contrôle en ayant le pouvoir.

Boy’s Abyss planche
©Ryo Minenami /Kana éditions

C’est démontré avec la famille de Tchako qui maitrise totalement ce qu’elle doit faire et anéanti ses rêves. D’ailleurs, c’est sa mère qui lui fait part de la décision prise par les hommes de la famille (son père et grand-père) à son sujet. Cette façon d’agir lui donne l’impression de ne pas exister pour son paternel et peut expliquer sa vision des hommes à son égard.

Même si les dramas s’accumulent de façon parfois lourde, ils donnent de nombreuses pistes de réflexion et sont traités avec rigueur. Le mangaka parvient à exposer l’esprit tordu de ses personnages et leur faiblesse. Les messages clairs sont cohérents avec les trames qui se recoupent et font planer de nombreux mystères. Le thème de la pression psychologique est décortiqué avec réalisme et l’ambiance efficace favorise l’immersion dans cet univers complexe.

(par Malgorzata Natanek)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782505113874

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