"Ender Geister" : un Seinen survolté à surveiller de près

Michael, surnommé le "Tireur Noir", est un exorciste de génie dont la renommée est internationale. Il voyage à travers le monde pour résoudre des missions d’exorcisme : en effet dans cette version alternative de notre monde moderne, sorcières, ogres et Kobolds pullulent !

Stylé, séducteur, efficace, Michael a tout du héros de film Hollywoodien, et rien ne semble pouvoir lui résister, de la gent féminine aux terribles créatures qui hantent les ombres. Jusqu’au jour où il est envoyé au Japon pour ce qui semble être une simple opération de routine. Il n’en est rien, et l’exorciste risque bien de faire face à son plus gros défi !

La nouvelle vague ?

Sans savoir à l’avance qu’Ender Geister est une publication numérique avant d’être papier, on se doute qu’il y a un truc étrange avec cette série. Dans son rythme, ses dessins, ses planches et ses dialogues, on est en tout point sur du manga mais avec un je-ne-sais-quoi de plus (ou de moins). C’est essentiellement le style du dessin qui trahit l’origine de l’œuvre. Sans doute le point faible le plus notable du titre (et pas dérangeant en tant que tel), on sent que toute la création graphique s’est faite à la tablette avec un recours intensif, presque abusif, aux "effets spéciaux" numériques (flou, brume, aplats). Le résultat n’est pas déplaisant, mais il requiert un petit temps d’adaptation et tranche assurément avec l’effet du bon vieux papier-crayon-trame.

Cette faiblesse n’entrave pas le plaisir de la lecture, on se doute simplement que l’expérience doit être probablement plus complète via une lecture numérique, comme c’est le cas avec les webtoons.

Néanmoins, la série peut se targuer de proposer au lecteur d’excellentes qualités. Son univers tout d’abord, dans lequel magie et technologie se mêlent, est assez rafraîchissant par rapport aux archétypes des mangas d’exorcistes qui embrassent souvent à fond le genre fantastique.

Ensuite, le personnage principal, cliché sur patte entre Ethan Hunt, John Wick et Johnny Depp, fonctionne carrément bien, et on s’attache très vite à lui. En outre, son style de combat (armes à feu au corps à corps) est très graphique et permet de jolis moments de bravoure (comme la scène dans l’avion, très très classe).

L’histoire enfin est très rythmée sans être étouffante. Les deux premiers tomes alternent bien séquences explicatives pour renseigner le lecteur et faire avancer l’histoire, et passages d’action survoltés pour relancer l’intérêt. Ils tissent la toile d’une intrigue complexe et intéressante, dont on a déjà hâte de connaître le dénouement.

Mais...

Cependant, pour appâter et conserver ses lecteurs, la série recourt pas mal au "fanservice" via ses personnages féminins et particulièrement Chikage, alliée de Michael. Elle est singulièrement "mise en valeur" (vous voyez ce que je veux dire) sur la couverture du deuxième tome, et elle se retrouve à plusieurs reprises fortuitement (et gratuitement) dévêtue, ainsi que plusieurs autres personnages féminins à l’anatomie généreuse.

L’artifice est un peu grossier et pas franchement nécessaire : la série est suffisamment captivante par son intrigue et ses personnages pour en plus avoir besoin de rajouter des nichons ici et là. On suppose qu’un certain type de lectorat appréciera, mais au global ces scènes tombent un peu à plat. C’est surtout cette dimension qui vaut à la série son classement dans la collection Seinen de l’éditeur et qui, de fait, l’éloignera du jeune public. Ce qui est assez dommage car en omettant ces passages, la série est tout à fait adapté aux 16+.

Pas exempt de défauts mais vraiment intéressant par plusieurs aspects, Ender Geister pourrait bien être la première occurrence d’une nouvelle vague du manga, plus moderne et numérique mais dont les marques sont encore à trouver et à peaufiner. Ce coup d’essai reste très convaincant, et saura sans aucun doute trouver son public en librairie pour s’assurer un avenir radieux. On le lui souhaite de tout cœur en attendant le tome 3.