Difficile de renouveler les approches d’un mythe connu du monde entier et revisité un nombre incalculable de fois, que ce soit en romans, BD, films ou même séries télévisées. Et pourtant ! Geoffroy Monde et Mathieu Burniat se sont frottés au cycle arthurien et ont réussi le tour de force d’en proposer une approche novatrice sans pour autant perdre leur marque de fabrique.
Reportage : Stéphane Grobost — Montage : Oussama Karfa
Les amatrices et amateurs de l’humour décalé du créateur de De rien retrouveront avec bonheur son sens de la dérision dans la quête d’Ysa, fille d’un roi Arthur devenu une loque humaine.
Encouragée par l’épée du roi (oui, l’épée parle, c’est absurde et c’est normal, bienvenus chez Geoffroy Monde !), elle s’enfuit du château paternel pour échapper à un mariage forcé et retrouver sa sœur aînée Maxine. Mais le voyage n’est pas de tout repos et, de déconvenues en déconvenues, Ysa va finir par être vraiment furieuse. Elle remontera ainsi jusqu’aux origines de la légende de son père, triste marionnette au service d’une épée façonnée pour contrôler son porteur.
Furie road
Le duo a clairement choisi son camp : les femmes sont en vedette et les hommes ne servent à rien ou presque. Ysa est une adolescente au caractère bien trempé qui n’hésite pas à s’opposer à la décision de son père de la marier de force au vieux baron de Crumbe. Éprise de liberté, elle se rebelle également contre sa sœur Maxine lorsque celle-ci essaie de la convaincre qu’elle n’aura pas mieux que le mariage ou le lupanar en tant que femme. Bien que raisonnable et posée, Maxine finira elle aussi par succomber à l’appel de l’aventure. Enfin, l’épée est une autre figure féminine, cette fois-ci manipulatrice et assoiffée d’action et de meurtres.
Face à ces trois rebelles, les hommes ne font pas le poids et ont tous les défauts. Alcoolisme, idiotie, apathie, orgueil, tyrannie, superstition, toute la panoplie est distribuée entre Arthur, le baron de Cumbre, son suivant Claude et les habitants des villages.
Simple Minds
Ceux qui connaissent le travail de Mathieu Burniat retrouveront la ligne simple des Mystères du monde quantique et le décor foisonnant et très travaillé de Sous Terre. Son dessin fait ici écho aux caractères des personnages dont les traits sont assez grossiers et les formes volontairement simplifiées car ils ne sont dans l’ensemble ni très futés, ni très fins.
La colorimétrie est très tranchée, avec des couleurs associées à tel ou tel univers ou sentiment : le rouge pour la colère, le noir pour le deuil, la mort ou le désespoir, le vert pour les créatures dégoûtantes de l’enfer ou encore le jaune pour le pommeau de l’épée.
A côté de cela, Burniat a créé un univers foisonnant de créatures toutes plus bizarres les unes que les autres, qui vient enrichir le panel d’humains pas très malins imaginé par Monde.
En bref, Furieuse est une belle réussite d’humour absurde qui a amplement mérité son Prix Lyon BD 2023 !
(par Gaëlle BEDIS)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
![Serge Monfort : « En lisant, l'enfant devient le chien, comme il deviendrait chevalier dans une BD médiévale ! » [INTERVIEW]](local/cache-gd2/07/a53eabf15a5df16adbd03466676855.jpg?1713070409)
!["Les Guerres de Lucas" Laurent Hopman & Renaud Roche : "En tant que fans, bien évidemment on connaît Star Wars, mais pas la trajectoire humaine du projet " [INTERVIEW]](local/cache-gd2/ce/e9ea1934bbbf33e5d2785721495d1a.jpg?1713071423)
![Anne-Caroline Pandolfo (Copenhague) : "Nana Miller fait quelque chose que l'on rêve tous de faire" [PODCAST]](local/cache-gd2/8d/a904fc88b39878307a2f910c257015.jpg?1713070422)
