BD d’Asie

Le Château ambulant ou le conte de princesse revisité par Miyazaki

Par Anh Hoà Truong le 3 décembre 2004                      Lien  
Le nouveau film du génial géniteur de Chihiro, Nausicaa ou Mononoke vient sublimer de sa féerie les toiles de nos salles obscures. Décollage pour une nouvelle envolée onirique le 12 janvier 2005.

L’ampleur que prend l’annonce de tout nouveau film des studios Ghibli signé par Hayao Miyazaki atteint désormais une envergure aussi internationale que colossalement prestigieuse. Par ailleurs, après le Japon, la France est sûrement le deuxième pays où ce réalisateur est aussi populaire, preuve en sont les 700.000 entrées de Laputa, le château dans le ciel ou le million du Voyage de Chihiro. Ainsi et comme à l’accoutumée pourrait-on dire, c’est avec la fébrilité d’un premier baiser que le spectateur averti frémit lorsque les premières lueurs du sigle Ghibli (illustré d’un Totoro) viennent imprégner sa rétine.

Magie de l’optique et par conséquent du cinéma, chaque onde photonique ricochant de la toile à notre œil porte en elle un soupçon de l’histoire ; une histoire d’amour en l’occurrence : celle de Sophie, une jeune fille qui ne « se sent pas belle », et de Howl, un sorcier au narcissisme maladif. Magie de l’histoire et magie dans l’histoire, l’univers marie poudre de mandragore et poudre à canon. En effet, c’est dans un contexte de tumultes militaires que notre héroïne Sophie va prendre littéralement un coup de vieux provoqué par le sortilège d’une vicieuse sorcière courroucée. Sous la peau fripée d’une petite mamie rabougrie, elle partira en quête d’un remède et croisera la route du château à pattes de Howl.

Le Voyage de Chihiro fut une incursion dans le folklore et l’imaginaire nippon ; Le Château ambulant, lui, nous transporte dans un univers aux références beaucoup plus communes à nos racines culturelles occidentales. Le fil rouge est le mythe de la princesse et du crapaud, transposé dans un univers de steampunk proche de celui de Laputa, le château dans le ciel. Evidemment, le féministe militant qu’est le père de Nausicaa ne pouvait reprendre de tels contes avec une mièvrerie « disneyenne ». Ainsi, Sophie, qui aurait pu être l’archétype de la soubrette introvertie, se démarque peu à peu par sa force de caractère et assume même sa vieillesse précoce avec un recul débonnaire. Elle jouera au final le rôle du prince charmant, prodiguant ses baisers comme remède à tous les maléfices. Ces multiples baisers sur la bouche sont d’ailleurs un détail remarquable dans l’œuvre du réalisateur japonais : hormis le baiser symbolique de Fiona dans Porco Rosso, les relations amoureuses ont toujours été très platoniques et asexuées (cf Kiki la petite sorcière, Le Château dans le ciel, Princesse Mononoke... ).

Tous les films de Miyazaki, et celui-ci ne déroge pas à la règle, sont autant de mets raffinés uniques, et pourtant leurs saveurs excitent toujours les mêmes papilles. La machine est bien rodée : une poésie aussi contemplative que touchante, des envolées aussi aériennes qu’oniriques, des héros aussi humains que charismatiques, et des personnages satellites aussi burlesques qu’irrésistibles (clin d’œil en particulier au « cochien d’Inde » Hinhn aux mimiques hilarantes), mais force est d’admettre que ces ingrédients se ressemblent énormément d’un film de Miyazaki à l’autre. Si bien que ce film aurait éventuellement pu s’appeler : "Le voyage de Princesse Sophie et de mon voisin Howl le petit sorcier sur le château ambulant dans le ciel de la vallée du vent... ". Plaisanterie mise à part, ce bémol rend-il le film décevant ? Bien sûr que non. Car la sauce prend à merveille, et fidèle au rendez-vous, l’émotion - quintessence de tout grand film - submerge le spectateur de tout son être.

Anh Hoà Truong

(par Anh Hoà Truong)

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