Vous avez une heure. Une averse vient d’arriver sur cet été pourri. Les ados sont au babyfoot, sur leur jeu vidéo ou sont aux cartes, en attendant qu’elle passe. Météo Radar vous annonce que le soleil reviendra en fin d’après-midi. Saisissez-vous de L’Art du Manga de Jean-Samuel Kriegk (Ed. Palette…).
On vous y enseigne les fondamentaux avec un point de vue généraliste : une contextualisation du manga dans la culture japonaise, son histoire (avec l’incontournable portrait d’Osamu Tezuka), sa segmentation sophistiquée, son économie, son succès à l’international, son lien avec la Japanimation et avec les jeux vidéo, et les « mangas à la française », un phénomène dont nous vous parlions il n’y a pas si longtemps ; enfin, un bref point de vue sociologique sur le manga au féminin, la violence et la sexualisation des mangas, la culture Cosplay, la Japan Expo, le manga et l’art contemporain et, bizarrerie au casting, le webtoon, industrie coréenne érigée en requiem pour la BD japonaise. L’auteur y ajoute les 50 titres d’une mangathèque idéale.
Vous prenez le temps de faire un tour agréable de la question le temps d’une soirée. Culture Manga – Introduction à la bande dessinée japonaise de Fabien Tillon (Nouveau Monde Graphic) est pour vous. Outre son écriture agréable et sa maquette très réussie, c’est pour moi un ouvrage parfaitement réussi. L’introduction évoque avec intelligence le manga comme une esthétique résultant d’une « collision entre l’Orient et l’Occident. »
Première déflagration : l’influence de la Corée et de la Chine, puis un premier embrasement par suite de la première incursion de l’Occident sur l’archipel en 1869 : « L’influence occidentale est jetée sur les braises de la civilisation nippone. Entre autres formes, le manga est né de cette opération d’alchimie. »
S’ensuit une lente explosion « qui rejaillit sur d’autres formes -le cinéma, les arts graphiques, le design, la publicité, les jeux vidéo- et qui rougeoie sous d’autres cieux : en Asie, en Europe, dans les Amériques. Partout dans le monde. »
Tillon nous fait un magnifique exposé sur cette « civilisation de l’image » qu’est le Japon, sur ses développements et ses régressions jusqu’à sa renaissance dans l’après-guerre et son déploiement grâce à certaines individualités (Saseo Ono, Osamu Tezuka) et son triomphe grâce notamment à la Japanimation.
Il nous débrouille ensuite « le maquis des genres » et les idéologies qui marquent sa production. Enfin, il évoque son destin dans la cristallisation d’un « nouveau pop art » qui marquera le siècle et le met dans la perspective de sa rivalité avec l’Occident mais aussi avec les autres bandes dessinées d’Asie : coréennes, chinoises… qui viennent frapper à sa porte.
Il conclut par un choix de 100 chefs d’œuvre très pertinemment choisis. Un parcours brillant d’une très agréable lecture. On recommande.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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