Est-ce peu de dire que nous ne sommes pas surpris ? Cela fait plusieurs années que Chris Ware et Emmanuel Guibert figurent dans la liste des « papabile ».
Chris Ware, parce qu’il truste régulièrement les premières places des prix prestigieux, en France comme à l’étranger. Ayant fait ses débuts dans la revue d’avant-garde Raw de Françoise Mouly et Art Spiegelman, c’est un expérimentateur hors pair qui arpente depuis plusieurs décennies les limites du 9e Art. Son dessin fait la jonction entre le classicisme des fondateurs du Comic Strip (George McManus, Winsor McCay) - ce qui lui donne une délicieuse touche vintage - et ses expérimentateurs les plus contemporains comme le Hollandais Joost Swarte, le créateur de la Ligne claire moderne.
Quant à Emmanuel Guibert, BDBoum de Blois, Grand Prix de la critique, Prix Goscinny 2018, on connaît son brillant parcours : Les Olives noires avec Joann Sfar, Le Photographe qu’il réalise avec Didier Lefèvre et Frédéric Lemercier, ses ouvrages mémoriaux qu’il consacre au soldat américain Alan Ingram Cope à L’Association, sa série pour la jeunesse Ariol avec Marc Boutavant…
Ses influences sont multiples et son style a bougé, entre le réalisme des Olives noires, son apport dans la BD de reportage avec Le Photographe, son trail sur l’univers enfantin dans Ariol. On sent bien que son séjour au Japon a eu un impact décisif sur son dessin aujourd’hui formidablement poétique, minéral.
Un parcours créatif, exemplaire, sans concession réalisé par une personnalité autant discrète que solaire.
Catherine Meurisse enfin est loin d’être « la femme de service » comme on pourrait le croire. Toute en sensibilité et en intelligence, elle était dans les radars d’ActuaBD dès ses premiers instants : lauréate du Prix Scolaire à Angoulême, elle fait l’Ecole Estienne à Paris avant de rejoindre l’équipe de Charlie Hebdo où elle côtoie Cabu, Cavanna, Wolinski, Charb… Elle s’en détache pour construire depuis ces dernières années une œuvre pétrie de références artistiques et littéraires : Mes Hommes de lettre, Savoir-vivre ou mourir, Drôles de femmes (avec Julie Birmant), La Vie de palais (avec Richard Malka), Le Pont des arts, Moderne Olympia, La Légèreté (à la suite du massacre de la rédaction de Charlie Hebdo), Scènes de la vie hormonale, Les Grands Espaces et récemment son Delacroix, adapté d’Alexandre Dumas… Tout cela aux côtés d’un travail d’illustratrice pour la jeunesse, de dessins de presse ou d’accompagnements de collectifs (pour L’Association notamment), un bilan impressionnant pour une autrice aussi jeune.
Bref, ce sont trois candidats tout à fait éligibles qui sont en compétition. Que donnera le deuxième tour ? Réponse à la fin du mois, au Festival d’Angoulême.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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FESTIVAL INTERNATIONAL DE LA BD D’ANGOULÊME 2020
Du 30 janvier au 2 février 2020.
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