Marjane Satrapi est née en 1969 à Racht en Iran. Au cours de son enfance, elle assiste à la révolution islamique et de la guerre irano-irakienne. En 1994, elle part en France pour étudier à l’École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg. Elle fait par la suite son entrée dans le célèbre Atelier des Vosges au cours des années 2000, où elle rejoint David B.,Joann Sfar ou Emile Bravo... Parallèlement, elle publie de 2000 à 2003 les quatre tomes de sa bande dessinée mémorielle Persépolis. Elle y revient sur son enfance et son adolescence en Iran, son voyage à Vienne, mais surtout, sur l’histoire de sa famille dans le climat tendu des crises iraniennes.
La série est un succès tant critique que commercial. En 2004, elle continue sur cette lancée en recevant le Fauve d’or à Angoulême pour son roman graphique Poulet aux prunes où l’on suit, huit jours durant, l’agonie de l’artiste Nasser Khan après la destruction de son târ, un instrument de musique à cordes pincées iranien dont il joue divinement.
Marjane adapte ensuite ces deux albums au cinéma avec un dessin animé pour Persépolis en 2007 et un film en prises de vue réelles pour Poulet aux prunes en 2010. Le premier, coécrit et réalisé avec Vincent Paronnaud, reçoit le prix du jury à Cannes ; le second sera quant à lui primé au festival international de film d’Abu Dhabi et recevra le prix du public à São Paulo.
Marjane Satrapi est dès lors une autrice confirmée, mais alors qu’elle semble arrivée au sommet de sa carrière, elle décide de se consacrer à d’autres formes d’art. Elle se consacre à la peinture, où elle cherche à immortaliser des femmes combattives et à croiser réflexions sur la condition féminine et réflexions politiques. Ses toiles sont mises au-devant de la scène en 2020, où la galerie Françoise Livinec organise une exposition nommée « Femme ou rien ».
Continuant son travail au cinéma - son prochain film, Paris Paradis, est en cours de réalisation -, elle revient plus récemment à la bande dessinée en dirigeant un album collectif intitulé Femme, vie, liberté, paru en 2023. On y retrouve les grandes thématiques qui traversent son œuvre depuis le départ (l’oppression, la condition féminine, la vie politique en Iran...) à travers l’histoire d’une jeune étudiante, Mahsa Ami, décédée après son interpellation par la police des mœurs iraniennes.
On le comprend, avec un tel parcours, l’annonce de sa nomination pour occuper le fauteuil V de la section cinéma et audiovisuel de l’Académie des beaux-arts vient couronner une œuvre qui ne se résume ni au cinéma, ni à la bande dessinée.
Quelle que soit la section, symboliquement, avec Marjane Satrapi, c’est à nouveau le neuvième art qui est reconnu. Elle rejoint Catherine Meurisse, qui a, quant à elle, été installée en 2023 dans la section « Dessin et gravure ». Avec l’installation de Pascal Ory comme l’un des 40 « immortels » à l’Académie française, celle à venir d’Emmanuel Guibert à l’Académie des Beaux-arts, l’année de conférences de Benoît Peeters au Collège de France, et prochainement, la grande exposition consacrée à l’Histoire de la bande dessinée à Beaubourg (« La Bande Dessinée à tous les étages » pour mai prochain), le neuvième art continue de faire son petit bonhomme de chemin au cœur de nos institutions culturelles.
(par Hippolyte ARZILLIER)
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En médaillon : Photo de Rahi Rezvani - Académie des Beaux-Arts
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