Le problème, quand on est en marge, quand on est inadapté, quand on n’est pas dans le système, c’est que la vie est aussitôt moins simple. Par accident ou à cause d’un piratage, Constant sort de cette « bulle » et perd littéralement connaissance, c’est-à-dire toute forme de savoir, et même son identité.
Il découvre alors un monde où l’énergie est rare, où la connaissance est limitée, et où le bonheur est néanmoins possible, où les sentiments sont vrais, moins frelatés. Un monde de dangers aussi, à mille lieues de sa sphère surprotégée d’où il vient, et où le « système » n’hésite pas à user de violence pour imposer sa loi. Cela donne un récit échevelé, une sorte de 1984 mâtiné de Koh-Lanta…
On le voit, à la réflexion existentielle se joint la réflexion politique. Avec subtilité, le créateur de Titeuf se projette dans cet avenir inquiétant et imagine ce qu’il adviendrait à ses enfants si l’Humanité persistait dans sa folie consumériste, dans sa conviction que la science trouve solution à tous les problèmes. On pense au Covid, bien évidemment, et à ses vaccins-miracle à répétition. Au nucléaire, dont on laisse les déchets aux générations futures en espérant que la science, une fois encore, puisse les traiter dans de bonnes conditions. En attendant, on pollue, on consomme, et tiens : oui, on vote, et advienne que pourra !...
Le fait que Zep a prêté à son héros les propres traits de son jeune fils fait comprendre toute la dimension personnelle qu’il donne à cette réflexion qui met en lumière la question du progrès, de son rapport à l’humain et de ses conséquences. Un album vertigineux.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Ce que nous sommes - Par Zep - 88 pages. Éditions Rue de Sèvres
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