Candy venait de Long Island/
Dans l’arrière-salle, elle était la chérie de tout le monde/
Elle ne perdait jamais la tête/
Même quand elle taillait des pipes
C’est du Lou Reed. Ces quelques vers traduits sont issus de la chanson qui donne son titre à cet album : Walk on the Wild Side. Le chanteur y dresse le portrait de quelques figures d’un New York fourmillant d’anciens marginaux devenus artistes. Le passage ci-dessus est consacré à Candy Darling, grande figure du New York artistique de la fin des années 1960 et du début des années 1970. Rêvant d’être actrice comme son idole Kim Novak, Candy, née Jim Slaterry, est devenue la première icône transgenre, alors que se dessinent en arrière-plan de grands mouvements de révolte et l’affirmation d’une liberté sexuelle et de genre que son enfance a réprimée. À New York, elle rencontre celui qu’elle considère comme son frère : Jeremiah Newton.
L’histoire est d’abord construire en mettant en parallèle les enfants de Candy et de Jeremiah : tous se sentent "différents" et cette différence n’est pas acceptée par leur famille (hormis la mère de James). Les deux se cherchent, entre quelques expériences artistiques et professionnelles, pas vraiment concluantes, jusqu’au départ pour Greenwich Village, où leurs chemins vont se croiser. C’est là que Jim devient "elle". Elle entre dans le cercle intime d’Andy Wahrol, et côtoie Salvador Dali, John Lennon, Lou Reed, Robert de Niro, qu’on croise tous dans cet album.
Elle est décédée à 29 ans d’un lymphome. 2024 marquera le cinquantième anniversaire de sa disparition. Son ami Jeremiah (toujours en vie, il signe la préface) entretient sa mémoire. C’est à travers son regard que le récit est construit : Jeremiah a en effet interviewé et enregistré les amis de Candy ; il a ensuite fourni ces documents, précieuse matière première, à Julian Voloj, ce qui a permis de restituer ce qui est non seulement l’affirmation d’une identité à une époque où se tenir la main dans la rue pour les gays était considéré comme un crime, les amours contrariées de l’artiste, mais aussi une histoire d’amitié qui a aussi permis à Jeremiah d’accepter son homosexualité. Divisé en une trentaine de petits chapitres, le récit est accompagné du trait coloré de Soren Mosdal, qui restitue l’ambiance éclectique de cette époque.
(par Damien Boone)
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