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"Convoi", un Mad Max déjanté à la française

Par Charles-Louis Detournay le 29 octobre 2022                      Lien  
Auteurs de "Mezkal", le dense récit hard boiled qui nous avait tant plu en début d'année, Jef & Kevan Stevens remettent déjà le couvert avec un récit tout aussi barré, mêlant humour, action, parodie, réflexions sociétales et postapocalyptiques. Un véritable melting pot qu'apprécieront les amateurs de second degré et de récit très accroché. Âmes sensibles s'abstenir !

Nous sommes en 2074 et la France apparaît dans un état de désolation comme jamais auparavant depuis l’extinction des dinosaures. Après les guerres nucléaires et chaos climatique, la terre est grise et plus rien n’y pousse. La société a dû s’adapter : finies les discussions policées, la violence est omniprésente. Les survivants se sont regroupés en clans, pour protéger leurs acquis ou dépouiller les autres. Une seule loi subsiste : celle du plus fort.

Cette absence de repère a permis aux divers types d’humains de s’accepter sans concession. Les confessions religieuses se mêlent aux tendances écolo, et les purs hétéros sont devenus une race en voie d’extinction au sein de ce conglomérat d’ultra-liberté sexuelle où l’on peut mourir demain.

Dans ce monde battu par les vents contaminés, il reste quelques richesses des plus convoitées, à commencer par les médicaments qui permettent à leurs détenteurs de non seulement prolonger leurs vies, mais aussi et surtout de les vendre au plus offrant afin de s’offrir une retraite dorée loin de ce merdier.

Mais les ultra-riches, propriétaires des firmes pharmaceutiques, ne sont pas décidés à se laisser dépouiller sans réagir par les bandes motorisées. Afin de faire traverser la France à sa cargaison aussi précieuse que sollicitée, un grand patron réunit une bande de guerriers barrés et dangereux. Et à leur tête, il place Alex. Ne vous fiez pas à sa blondeur, ses hauts talons et son pingouin philosophe, Alex ne se laissera personne barrer la route à son convoi entre Le Havre et Marseille.

Faites chauffer les moteurs et fourbissez vos armes : aucune pitié pour ceux qui auront la bêtise de les attaquer.

"Convoi", un Mad Max déjanté à la française

Parvenir à nous livrer un nouveau récit ultra-tostéroné de plus de 120 planches moins d’un an après le précédent, il n’y a bien que Jef capable de cette prouesse. Surtout que l’auteur ne se contente plus du dessin et des couleurs, il cosigne à nouveau les dialogues avec son nouveau scénariste fétiche, à savoir Kevan Stevens. Ces deux-là nous avaient d’ailleurs transporté dans leur précédent récit hard boiled de Mezkal. Une réussite qui laissait présager d’autres ouvrages du même niveau, et lorsqu’on a vu la force de la couverture de ce nouveau Convoi, on s’attendait à du tout tout bon !

Pour être honnête, ce nouvel opus ne parvient pourtant pas à surclasser Mezkal. La raison ? Peut-être ce ton d’humour et de parodie qui donnait de l’épaisseur à leur premier opus, qui doit cette fois venir se greffer sur un univers extrêmement rude. Quelquefois on rit de bon cœur, mais parfois on est presque choqué par la violence entre les protagonistes. Résultat : le contraste est à certains moments si marqué qu’on ne s’est plus très bien si l’on doit se marrer ou s’indigner.

L’explication se trouve certainement dans la préface que Jef a réservée à ce volume qui délivre un hommage passionnant à Temps X et aux Frères Bogdanov. Ce mélange de sérieux et de second degré trouve une forme d’explication, surtout lorsque les fameux jumeaux se présentent comme persos de l’album... sauf que ce sont cette fois des triplés !

Une double page qui présente tous les membres du convoi...
Combien arriveront au bout de la route ?

Cet écueil mis de côté, on passe un agréable moment dans ce convoi. Tout d’abord, parce que le dessin et les couleurs de Jef nous proposent de nouveau un excellent divertissement. Les personnages, même s’ils sont fort nombreux et hauts en couleurs, réservent quelques retournements de situation assez cocasses.

Les dialogues peuvent aussi désarçonner, car les deux auteurs ont tenu à mettre toute la dose de sel nécessaire (voire la montagne) pour bien souligner quelques messages appuyés. Il faudra donc prendre son temps pour lire et digérer tout cela, entre un "Tortue Génial" complètement barré et un banquet à la "Astérix" postapocalyptique.

Personne ne se prend donc au sérieux dans cette histoire, à commencer par les auteurs. Si la parodie reste une des clés du récit, Jef et Kevan Stevens ne se gênent pas non plus pour égratigner notre société et ses multiples dérives sociétales. Leurs personnages apparaissent tous comme le fruit d’aboutissements personnels douteux. Pas de critique directe, mais un délire assumé, et finalement tout l’album est à cette aune : un mélange entre Mad Max et Ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines, mêlé de séquences hard et voire quelquefois sexuelles. Aucune demi-mesure !

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782302095410

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