En 2021, certains célébraient, d’autres commémoraient tandis que la majorité était plutôt indifférente au 150e anniversaire de la Commune de Paris.
Parmi les bandes dessinées publiées sur le sujet, on se souvient des Damnés de la Commune de Raphaël Meyssan (Delcourt), du Cri du peuple de Jacques Tardi et Jean Vautrin (Casterman) ou encore des Passagers du vent : le Sang des cerises de François Bourgeon (Delcourt), des Graines sous la neige : Nathalie Lemel de Roland Michon et Laetitia Rouxel (Locus Solus) ou encore Communardes ! de Wilfrid Lupano et Xavier Fourquemin (Vents d’Ouest) offrant une vision plus féministe, ont cependant moins marqué les esprits.
Pré-publié dans la revue l’Immanquable, Aube apache - tiré d’un poème de Victor Hugo, nous apprend le site de l’éditeur Soleil - se situe certes en 1903, mais plonge ses racines trente ans auparavant. Causes et conséquences.
Ce qui frappe au premier abord dans ce récit, c’est le traitement des couleurs : remarquable travail en noir et blanc d’abord, avec des lavis de gris rehaussés de taches rouges, ici pour l’écharpe du personnage principal, là pour une robe de femme, là encore, pour des taches de sang…
Ensuite, l’histoire entraine le lecteur dans un mystérieux récit d’aventure où un acrobate assassine un banquier, un avocat, le patron d’un grand magasin...
Qui est-il, ce personnage masqué au large chapeau ? Un anarchiste comme celui de V pour vendetta ? Un justicier dont le manteau se déploie comme une cape ? L’inconnu au visage recouvert de son écharpe rouge laisse à chacune de ses victimes une pièce d’or à l’effigie de Napoléon III.
En ce début de XXe siècle, Paris se modernise dans la foulée des travaux d’urbanisme du baron Haussmann (tronçon aérien et creusement du métro, construction des grands magasins, apparition des automobiles...) et tente d’éradiquer la délinquance incarnée par la pègre de l’époque : les Apaches.
Ce n’est plus la Cour des miracles dont parle Hugo mais la confrontation entre le Paris populaire et une bourgeoisie de plus en plus nantie. Au milieu, la police, l’ordre ici incarné par l’inspecteur Gosselin souffrant d’un mal mystérieux, lequel tente de dénouer les fils de l’enquête avec une relative empathie pour les plus démunis. On le lui fait savoir : « Des opprimés ? Dites Gosselin, vous ne seriez pas socialiste vous ? Voire un peu dreyfusard ? » (planche 35).
Tiburce Oger et Philippe Pelaez décrivent une ville qui est loin d’être... lumière : leurs personnages ont des trognes de roman populaire et de polar poisseux, les décors et le contexte historique, particulièrement documentés par les auteurs, présentent une fiction d’une grande crédibilité dans leur représentation, par exemple, du travail des enfants ou leur description des quartiers populaires de Belleville.
Suite et fin dans le tome 2 Paris rouge.
(par Christian GRANGE)
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