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Geluck sort ses chats sur les Champs

Par François RISSEL le 25 mars 2021                      Lien  
Il crée l'évènement à chacune des ses apparitions publiques et encore plus ces derniers jours grâce à l'inauguration de son exposition de statues monumentales sur les Champs-Élysées. Nous avons rencontré Philippe Geluck, le dessinateur du Chat, un personnage devenu iconique. Quelle aventure que ces sculptures ! Geluck nous la raconte et évoque ici son rapport à l'art, et à la sculpture en particulier.

Cette exposition était prête l’année dernière, et puis tout a été arrêté en raison de la crise sanitaire. Comment cela s’est passé ? Pouvez vous nous en dire plus ?

Philippe Geluck. Ce qui se passe dans ma tête et dans mon cœur à ce moment là est indescriptible : on était prêts, nous avions lancé les invitations pour le mois d’avril et là, on apprend que tout va fermer, que tout le monde est confiné et qu’il est impossible de se déplacer. Je me suis dit que nous étions face à quelque chose qui nous dépassait totalement. En conséquence, je ne vais pas, moi, me plaindre de mon sort et de mon petit problème. Ce serait très inopportun au moment où plusieurs milliards de personnes à travers la planète sont dans l’angoisse, la maladie, la précarité, la désespérance... J’ai simplement fermé ma gueule, et j’ai dit qu’on le fera plus tard. J’en ai profité pour transformer cette période en une opportunité fantastique pour travailler et pour peindre.

Geluck sort ses chats sur les Champs

L’exposition à la galerie Huberty Breyne n’était donc pas prévue ?

Si, cette exposition était prévu de longue date. Mais je n’aurai pas été prêt avec autant de choses nouvelles l’année dernière. La plupart des toiles exposées ont été élaborées en 2020 et 2021. J’avais du temps pour faire des choses que je ne fais pas assez habituellement.

La mairie de Paris a été très emphatique. Ils ont dit que ce n’était pas une annulation mais bien un report. L’exposition est désormais installée, et quoi qu’il advienne, elle est là jusqu’au 9 juin.

J’aimerais rappeler que cette exposition ne coûte pas un centime, ni à la mairie de Paris, ni au contribuable français. Seize des statues ont été vendues avant même d’avoir été vues.

Vous avez un rapport très fusionnel à l’art et à l’histoire de l’art, est ce que vous pourriez préciser ce rapport à travers le prisme de la sculpture ?

Ce rapport à l’art s’est d’abord installé dans mes tableaux. J’ai voulu rendre hommage à Léonard De Vinci, à Vasarely, à Pollock… J’ai beaucoup de choses à dire à mes confrères du passé. Évidement dans mon travail sculpté, le même principe s’installe. La première sculpture du Chat que je réalise en 2003, c’est Le Discobole en hommage à Myron. Il deviendra le symbole de l’exposition à L’École des beaux-arts et il est présent ici dans un format monumental.

Je rends ensuite hommage à Rodin, avec mon Parleur, mais aussi à Botero, avec mon danseur. J’étais en Normandie chez mon ami Laurent Ruquier quand il m’a dit qu’il adorerait avoir la danseuse de Botero dans son jardin, je l’ai pris au mot. Une autre est une interprétation du Martyre de Saint Sébastien, qui rend évidemment hommage à mes confrères assassinés. Il y a aussi l’auto écrasée, le juste retour des choses, un salut à César. Il y a beaucoup de citations...

Le "Chat danseur" de Geluck a été inspiré par "La Danseuse" de Bottero. Le Chat est un peu moins souple...

Vous êtes dans un dialogue permanent en fait ?

Oui, un dialogue à une voix puisqu’ils ne me répondent plus. Mais dans un sens non, car Rodin me parle, Vermeer me parle, tous ils me parlent à travers les siècles. Je me dis, quand je suis devant leurs œuvres, qu’ils me parlent à moi Philippe. Quand je réalise un dessin ou une sculpture, je parle à chaque personne qui se retrouve devant mon travail. Je me réjouis à l’idée que les gens rigolent ensemble devant une statue du chat. Le dialogue que j’opère avec les gens qui sont là, je le fais virtuellement avec les artistes du passé, et les gens présents comme Soulages par exemple.

Un peu de respect...

Souvent dans la statuaire grecque comme dans celle de la renaissance, les statues étaient déformées afin que le spectateur qui regarde la sculpture d’en bas, visualise l’œuvre dans de justes proportions. Avez vous pensé à cela pendant la conception ?

(Petit silence). Je réponds peu aux canons de la statuaire classique, sinon dans le côté boulet du Chat (canon-boulet...). J’avoue que je n’y ai pas pensé. Mais bon, en revanche, les sculpteurs grecs, et même Michel-Ange, n’avaient pas pensé non plus qu’on allait faire des reproductions de leurs œuvres en petit format, en cadeaux-souvenirs. Ils ont l’air cons maintenant !

La BD est-elle un art contemporain ?

Certains le considèrent.. D’autres, les tenants de la vérité, ceux qui ont décrété que tel ou tel artiste ne méritait que le mépris, pas vraiment. Ce fut le cas pour Rodin à ses débuts, et pour de nombreux artistes. Mais on s’en fout, finalement. M oi je fais mon truc, chacun décide ce qu’il veut ensuite. La seule chose qui me ferait plaisir, un jour, c’est que l’on me reconnaisse comme chef de file de « l’art rigolo ». C’est une branche des beaux-arts qui est peu considérée, je trouve, et moi j’aime quand on rit devant un tableau, plutôt que de le regarder en ayant l’air de s’ennuyer mortellement !

Propos recueillis par Didier Pasamonik et François Rissel.

"Pipi et Grosbidet".
Geluck peint...
© Philippe Geluck

(par François RISSEL)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782203203624

- "Le Chat déambule" - Exposition sur les Champs-Élysées du 26 mars (inauguration à 11 heures) au 9 juin 2021.

- "Le Chat à Matignon" - Huberty & Breyne Gallery - 36 avenue de Matignon - 75008 Paris - Du 26 mars au 5 juin 2021 - LE SITE INTERNET DE LA GALERIE

À lire sur Actuabd.com :

- Notre reportage sur les scultptures monumentales du Chat de Geluck sur les Champs Élysées

Photos : Didier Pasamonik et François Rissel / ActuaBD

Casterman ✏️ Philippe Geluck tout public
 
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6 Messages :
  • Geluck sort ses chats sur les Champs
    25 mars 2021 14:51, par maitre Capello

    je le fait virtuellement avec les artistes du passé
    je le FAIS

    Répondre à ce message

    • Répondu le 25 mars 2021 à  18:28 :

      Si on est dans les fautes d’orthographe (courantes sur ce site), dès le début, le troisième mot du texte : évÉnement, et pas évÈnement.

      Répondre à ce message

      • Répondu par Frédéric HOJLO le 25 mars 2021 à  20:34 :

        Le travail de relecture et de correction est énorme pour une équipe de bénévoles. Merci d’en tenir compte et de nous signaler les erreurs... Avec tact si possible.

        Alors, « événement » ou « évènement » ? Les deux sont acceptés depuis trente ans au moins.

        Répondre à ce message

      • Répondu par RD le 25 mars 2021 à  21:34 :

        "Evènement" n’est plus une faute... Dans Le Robert, vous trouvez les deux orthographes depuis au moins 1994...

        Répondre à ce message

  • Geluck sort ses chats sur les Champs
    29 mars 2021 21:57, par Laurent Colonnier

    J’y suis allé ce week-end. Très chouette expo, gros succès, beaucoup de monde, les statues sont très réussies (la souris en volume ressemble traits pour traits à Ignatz Mouse la souris du Krazy Kat d’Herriman).

    Une question : sous certaines statues le nom ou la raison sociale des acheteurs, et sous au moins deux statues la mention "famille Tintin". Qui est ou sont les acheteurs sous cette dénomination ?

    Répondre à ce message

    • Répondu par Milles Sabords le 9 avril 2021 à  13:39 :

      Petite précision qui vaut son pesant de bronze : Geluck a annoncé dans les Grosses Têtes que ses sculptures valent 300.000 euros pièces. Belle culbute pour le futur musé !

      Répondre à ce message

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