"In Summer", la poésie de l’instant par l’évocation du quotidien

Traduit du coréen par Hyonhee Lee, ce recueil de deux nouvelles : « In Summer  » et « Panorama » raconte deux récits estivaux vécus par des adolescents. Nous suivons tout d’abord la trajectoire de Joo-Chan, un jeune garçon victime de harcèlement scolaire qui entretient une relation fusionnelle avec son chat et qui adore inventer toutes sortes de machines étranges. Un jour, son compagnon meurt subitement laissant en lui un vide singulier. C’est alors qu’il va partir à la recherche de son fantôme et qu’il fera la rencontre de Ji-Su une adolescente dont la sensibilité est semblable à la sienne. Dans un ton relativement similaire, « Panorama » évoque la rencontre fortuite entre deux jeunes femmes sur une plage qu’un petit appareil photo va déclencher.

Seong Ryul © Le Lézard Noir

Dans cet album Seong Ryul couche sur papier des scènes du quotidien avant qu’elles ne disparaissent. Il présente des histoires d’enfants en apparence anecdotiques mais qui ont une importance beaucoup plus forte qu’on ne pourrait le penser. Il arrive à saisir des instants de vies et à leur insuffler un caractère contemplatif qui permet d’en apprécier toute la force et l’évocation. Le cadre et la période dans lesquels se déroulent ces histoires est également primordial, de cette ville périphérique de la première nouvelle à la station balnéaire de la seconde, ces deux environnements transposés à la faveur de l’été renforcent le caractère splendide de ces moments. L’auteur parvient à capter la candeur et la violence de l’adolescence à travers ces deux récits qui dépeignent des personnages blessés et seuls.

Seong Ryul © Le Lézard Noir

Comme il se plaît à l’expliquer lui-même à la fin de cet ouvrage : « À la fin de l’ère analogique, je me demande si je pourrai encore dessiner sur papier à ma guise. Et je sens que le paysage qui m’entoure change rapidement. Le rythme de la vie s’accélère également. Ce que je fais, c’est saisir au quotidien chaque paysage, qui un jour disparaîtra ou qui a déjà disparu, et l’enregistrer sur papier, le plus fidèlement possible. » Pour illustrer ces deux tranches de vie, le dessinateur (déjà très connu sur Instagram avec plus de 235 000 abonnés) a choisi d’utiliser l’aquarelle, sa technique de prédilection. Ses planches sont d’une qualité rare. Il compose des paysages urbains où la végétation est luxuriante et les personnages doués d’une expressivité qui nous permet de comprendre toute la subtilité de leurs émotions, sans parler de son usage du bleu ou de ses paysages crépusculaires de fin de journée.

Seong Ryul © Le Lézard Noir

À travers la chaleur et l’insolence de l’été, Seong Ryul décrit ces curieux hasards qui donnent leur importance à des moments quelconques dont il se dégage un très sérieux potentiel poétique. Un premier ouvrage plus que réussi.

Seong Ryul © Le Lézard Noir

Seong Ryul © Le Lézard Noir