Marijah est une "Taï Dam" ou "Thaï noire" du Laos, du nom de ce groupe ethnique de l’Asie du Sud-Est : mais ce qui est une appartenance ou une culture pour beaucoup n’est qu’un mot pour elle, puisqu’elle n’avait que quelques mois quand ses parents, avec son frère et sa sœur, ont fui le Vietnam en 1976. Que reste-il de ce passé ? Est-ce seulement souhaitable de s’y replonger ? C’est surtout à travers le regard de Joël, son compagnon, que l’on découvre que Marijah traîne une certaine mélancolie, notamment à travers ses peintures, qu’il admire : celles-ci sont principalement de couleur sombre, comme si l’absence de lumières traduisait un manque. Joël l’encourage avec bienveillance à découvrir ce passé qu’elle ne connaît pas, et c’est finalement une discussion fondatrice avec ses parents qui va emmener Marijah en Thaïlande, au Vietnam et au Laos, le long du Mékong, pour un véritable voyage initiatique.
Si le fil rouge du récit est centré sur le questionnement identitaire de Marijah, française en quête de ses racines, la (re)découverte d’une autre culture et la rencontre avec sa famille, Joël Alessandra aborde également des éléments d’histoire méconnus dans ce qui fût "la perle de l’Empire", à savoir l’ancienne Indochine française, et notamment sa décolonisation. Il est aussi l’histoire d’un couple soudé, où Joël accompagne avec tout son amour (notamment à travers ses croquis, son récit en "voix-off", mais aussi des aquarelles qui reproduisent de magnifiques paysages et donnent au récit un décor grandiose) la démarche de sa compagne, qui trouve en Asie des sources d’inspiration pour ses peintures qui se renouvellent.
Taï Dam se lit dès lors comme histoire pleine de sensibilité qui invite à se questionner sur la connexion avec soi-même, grâce à un voyage tant géographique qu’intérieur, qui permet de comprendre comment trouver et entretenir un équilibre familial, amoureux, ou même professionnel.
(par Damien Boone)
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