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Le cauchemar de Simone

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 16 avril 2022                      Lien  
C’est un cauchemar qui surgit du passé, en 1972. Simone Lagrange, 42 ans reconnaît sur un écran de télévision, dans le visage d’un vieil homme aux traits fatigués qui a tout l’air d’un papy plaintif que l’on aurait tiré brutalement par erreur d’une retraite paisible, le tortionnaire qui l’a tourmentée près de trente ans plus tôt dans la prison de Lyon. À l’époque, Simone s’appelait Simy, Kadosche de son nom, elle était une enfant, arrêtée avec ses parents. Cet homme, c’est Klaus Barbie, le chef de la section V de la Gestapo, « le boucher de Lyon », l’assassin de Jean Moulin. La France vient d’obtenir son extradition et prépare le procès...

Simone est une rescapée de la Shoah. Toute sa famille n’a pas eu sa chance. Elle se souvient de cette époque terrible où, à partir de novembre 1942, les Allemands avaient pris le contrôle de la « Zone libre » et poursuivi la chasse aux Juifs et aux résistants. À la vue de cet homme apparu subitement sur son petit écran, son cauchemar qu’elle croyait enfoui, resurgit.

Le cauchemar de Simone

Il a notamment le visage hideux d’une petite camarade dénonciatrice et celui d’une institutrice collaborant sans état d’âme avec les nazis. Ou comment l’inhumanité peut s’insinuer jusque dans les plus petits interstices de la société sous des prétextes divers…

Simone deviendra l’un des témoins-clé du procès Barbie, responsable notamment de la déportation des Enfants d’Izieu et de l’arrestation de Jean Moulin, créateur et président du Conseil national de la Résistance qui unifiait tous les mouvements de Résistance du pays.

Les auteurs d’Irena (chez le même éditeur, Glénat), Jean-David Morvan, Séverine Tréfouël et David Evrard, remettent le couvert dans leur travail de mémoire sur la Shoah et la Seconde Guerre mondiale, en s’intéressant à une jeune femme, déportée à Birkenau, revenue quasiment par miracle de l’enfer. Sa détermination aboutira à la condamnation de l’un des responsables les plus importants du génocide des juifs et des tsiganes en France et l’un de plus cruels bourreaux des résistants français.

Prévu pour être un triptyque, on retrouve dans cet album les qualités que Morvan et Evrard avaient développées dans Irena : l’histoire bouleversante et documentée d’une femme extraordinaire que l’Histoire avait quelque peu oubliée mais dont l’action méritait cependant d’être mise en lumière. L’avantage de l’approche graphique d’Evrard, c’est que son dessin « enfantin » permet d’évoquer des choses terribles, sans le voyeurisme et l’aspect traumatisant que revêt d’ordinaire la représentation de ces horreurs.

On est frappé par la qualité de la documentation qui sous-tend le scénario. Ainsi, dans la séquence de l’interrogatoire de Jean Moulin, on découvre quel était le métier d’origine de l’ancien préfet : illustrateur. S’adressant directement à l’intelligence du lecteur, la narration subtile de Morvan distille sentiments et informations avec une probante efficacité au moment où il est nécessaire de redécouvrir, alors que notre quotidien est rythmé par les terribles événements en Ukraine, le sens profond et nécessaire du mot « résistance. »

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782344043158

Simone T.1 - Par Jean-David Morvan, Séverine Tréfouël et David Evrard - Glénat

Simone Glénat ✍ Jean-David Morvan ✍ Séverine Tréfouël ✏️ David Evrard tout public Biopic Histoire Shoah France
 
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1 Message :
  • Le cauchemar de Simone
    17 avril 2022 09:55

    "au moment où il est nécessaire de redécouvrir, alors que notre quotidien est rythmé par les terribles événements en Ukraine, le sens profond et nécessaire du mot « résistance. »"

    Il est toujours nécessaire de rappeler que résister n’est pas un choix mais un devoir. Et ce devoir commence par les urnes. Personne ne peut faire le choix de l’extrême-droite parce que personne ne peut faire le choix de renoncer à ses libertés. Faire le choix de l’extrême-droite, c’est fermé les yeux sur ses crimes du passé, fermer les yeux sur la Shoah, fermer les yeux sur la Résistance, fermer les yeux sur ce que l’Histoire nous enseigne, fermer les yeux sur le futur et surtout sur celui de nos enfants.

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