Rappelez vous janvier 2021. Venait de débouler sur les étalages des librairies le premier bouquin de Nina Lechartier : Un Soir de fête aux éditions Magnani. Un grand format cartonné, papier épais, couvrante façon toile au maillage soyeux sur laquelle nous fixe de ses yeux rouges une femme au teint bleu et cheveux noirs dont la silhouette se détache d’un paysage crépusculaire et bucolique ; un lac aux eaux troubles entouré d’une forêt sinistre acculée aux pieds d’une imposante chaîne de montagnes.
Sa composition n’est pas sans rappeler (de loin) le célèbre Cri du peintre expressionniste Edvard Munch, sauf que là, personne ne gueule et que les couleurs dominantes tirent plus sur le bleu et le vert que sur l’orange ou le rouge. Le style reste plus lâché que brut, onduleux et minimal, résultat d’une confection rapide mais mûrement réfléchie.
Sur le verso, une petite clairière où, autour d’un grand feu, guinche une clique étrange et quelque peu exaltée ; un monstre orange à grandes oreilles dressées sur la tête, un ado à casquette bleue et Ray-ban, un type à la peau de dalmatien, une petite dame à la peau rose fluo et aux cheveux vert menthe, un long pif pendant sur sa poitrine comme une chaussette abandonnée sur le rebord d’un panier de linge sale. Durant ce sympathique sabbat, un chauve barbu à lunettes fait griller peinard une chipo au bout d’une fourchette... En voilà un intriguant emballage qui donne parfaitement le ton comme l’ambiance du contenu : incursion dans un univers hermétiquement clos, miniatures sous cloche façon boule à neige fêlée, bizarreries rituelles et faune étrange en guise d’éclaireur.
Nina Lechartier : « J’ai fait Un Soir de ête quand j’étais en dernière année à la HEAR, en 2016, et je l’ai un peu remanié l’année suivante. Mais la période de création s’étale sur un peu plus de temps en arrière, parce qu’il y a un temps de mûrissement qui nécessite plusieurs mois, plusieurs faux départs et de nombreuses pauses. Un soir de fête s’inspire de plusieurs voyages que j’ai faits ou projetés de faire et laissé tomber, de l’Europe centrale, d’une certaine façon d’écrire désuète dans les livres que je lisais à l’époque et bien sûr d’expériences de fête. Le titre complet est Un Soir de fête, et autres nouvelles touristiques.
Pour moi évoquer le tourisme, c’était par rapport au fait qu’elle voyage seule, mais aussi qu’elle est dans une attitude de consommation par rapport à ce qu’elle rencontre comme personnages ou évènements effrayants : elle ne réagit pas, à part parfois pour fuir, elle est un peu tout le temps à côté de ses pompes. »
Bien baveuses sur les bords, les cases chamarrées de Nina Lechartier sont d’une revigorante impertinence formelle et d’une grande liberté d’exécution. Sa touche franche et tortueuse nous trimballe les mirettes quelque part dans les friches de la peinturlure sauvage que ce bon vieux Magritte a arpenté avec les toiles hirsutes de sa période vacheou que la peintre abstraite Shirley Jaffe a débroussaillé au moyen de ses gouaches sur papier, spontanées et volontairement inabouties.
La peinture agît ici comme un désinhibiteur providentiel, propice à libérer la main sans caution et à affranchir l’imagination de toutes contraintes logiques. De fait, les histoires sont aussi mal dégrossies que les images qui les supportent et dérivent volontiers vers un délire fiévreux qui fulmine parfois jusqu’à l’abstraction totale. Soutenue par un texte à la typo chaloupée en guise de cartouche façon livre pour la jeunesse, la narration (toujours à la première personne) se glisse dans les interstices les plus saugrenus de l’autofiction fabuleuse, voire du conte intime débraillé.
Nina Lechartier : « J’ai mis longtemps à trouver un style graphique qui soit vraiment à moi. Avant, j’ai essayé la plume, l’encre de chine, Photoshop, le feutre, le crayon à papier... Mais ça marchait bof-bof. Je pense qu’à un moment, il y a eu un alignement de circonstances où, en même temps que j’en avais marre de galérer en dessin, j’ai revu le cri de Munch. J’avais toujours super envie de faire de la BD et rien que ça. Je me suis alors dit que je pourrais faire des personnages qui aient tous cette tête. J’ai acheté des tubes d’acrylique pour me faire plaisir et j’ai fait une BD de 80 pages de A à Z, avec un peu de collage aussi. (BD qui est toujours dans un carton, que j’aimerais bien faire éditer un jour...) Après j’ai commencé à faire des têtes de personnages plus diversifiées, parce que je pense que je ne peux pas me reposer sur un système toute ma vie, même si il a fonctionné une fois.
Dans Un Soir de fête, il y a aussi une histoire qui est peinte sur du tissu (La Chose sous le jardin). Mais là, je suis de moins en moins expérimentale dans mes procédés parce que j’ai trouvé des choses qui marchent, au fur et à mesure, et le collage et le tissu, c’est fragile... L’Invité fantastique, c’est uniquement de la peinture sur papier.
En peinture, j’adore les artistes du siècle dernier mais j’ai tout de même trois icônes absolues : Marianne von Werefkin, Natalia Gontcharova et Leonora Carrington. Ce que j’aime dans les avant-gardes du 20ème siècle, c’est qu’il y énormément de choses qu’on peut trouver moches, mais qui sont à mon sens plus proche de la vraie beauté que des peintures qui seraient juste jolies, ou décoratives. En ce qui concerne la BD, j’ai été marquée parLisa Mandel et Anouk Ricard quand j’étais enfant et ado. Leurs bandes dessinées me faisaient beaucoup rire. C’est donc normal que l’humour soit au cœur de ma pratique aujourd’hui. Et puis, dans mon travail, il y a des influences littéraires aussi. J’adore les choses exagérément bien écrites, alors dans mes livres il y a des passages où j’essaie de faire des belles phrases, des belles descriptions textuelles. »
Je mets au défi quiconque de contenir une joie toute régressive à la lecture de ces différents chapitres aussi drôles que dérangeants. Qu’elle narre cette teuf minable chez le Baron Ranfler-Rantler (mention spéciale à cette sentence à demi-charlieschlinguesque : « D’après lui, mon haleine sent les pieds »), ce rencard tragique avec le musculeux John Alexander, ce barbecue de la lose intégrale dans un camping paumé où un étrange ermite baragouine un italien plus qu’approximatif ( « dove si trova la stazione di benzina » = « Mon cœur, vos yeux sont des étoiles dans le firmament céleste »), ou bien encore cette visite commentée des musées improbables (Le musée des cailloux dont la forme peut évoquer autre chose), Nina Lechartier a la délicatesse de diluer ses obsessions - le ratage, la bouffe, l’art et l’amour - dans un bain de fantaisie brute qui n’occulte jamais la mélancolie. La politesse d’une grande conteuse, vous dis-je !
Nina Lechartier : « C’est long et rébarbatif à faire, des cases de bandes dessinées, et je ne suis pas une grande dessinatrice. J’ai donc trouvé une façon de m’amuser en le faisant : étaler de la couleur. Ceci dit, je ne suis pas non plus une peintre "technique". Pour moi, la bande dessinée, c’est avant tout un art de la narration. Mes scénarios sont très construits d’ailleurs. À mon sens, je ne suis pas du tout dans la BD expérimentale. Je pense beaucoup à la réception, aux personnes qui liront mes livres. Parfois des personnes qui ont lu mes livres me demandent si j’écris "comme ça vient" et sont surprises quand je leur explique que non, que je fais un storyboard ultra détaillé, que j’écris mes scénarios pendant plusieurs mois avant de réaliser les planches. La peinture et le papier ça coûte cher donc je n’ai pas les moyens de naviguer à vue sans savoir où mon projet va. J’ai besoin d’un plan. En plus, je n’aime pas du tout les trucs écrits "spontanément", je trouve que c’est paresseux comme façon de faire et chiant à lire. Désolée, je ne suis pas franchement une hippie cool, je me casse vraiment la tête sur mes BD. »
Autre année, nouveau livre toujours dans la même écurie - les éditions Magnani, jeune maison qui compte parmi ces talents quelques plumes chères à mon cœur d’esthète-troupier : Marion Fayolle,Adèle Verlinden, Lisa Mouchet,Margaux Meissonier ou Maïté Grandjouan.
Mais revenons à Nina et à son dernier opus : L’Invité fantastique sorti en avril 2022. Le livre cette fois est plus trapu (un demi kilo quand même), le papier de bonne tenue et la couverture souple. On y voit un petit bonhomme, un chapeau à plume posé sur sa longue chevelure, qui suit une jeune femme blonde, long cils noirs et visage recouvert d’écailles bleues, avançant d’un pas sûr dans sa longue robe immaculée et tenant dans sa main droite une corde. Derrière eux, un paysage bariolé comme jamais. Au loin, une maison orange et à sa fenêtre, une silhouette observe notre petit couple.
Au recto de l’ouvrage, une île flanquée au beau milieu d’une mer toute aussi agitée que les coups de pinceaux de l’autrice. Le décor est vite planté ; un ponton de bois, quelques maisonnettes perdues dans la jungle et une immense montagne. Ah, pas de doute possible ! Nous voilà repartis en vadrouille dans des contrées fantastiques. Et là aussi, encore heureux, le guide n’a toujours pas l’air de bosser pour un quelconque office de tourisme.
Les rabats poursuivent les présentations avec quelques personnages aux figures grotesques, relectures naïves des pieds nickelés de Pellos par un Yuichi Yokoyama qui aurait bazardé règles et compas ; un chien rouge bien moche tavelé de pois jaunes au bout de la longe mentionnée plus haut, une sorcière approximative à peau verte et cheveux violets dont le globe oculaire pendouille au bout de son nerf, une longue silhouette à rayures blanches et rouges surmontée d’un losange en guise de tête qu’un œil en amande vient trouer, un nain chauve un rien violacé qui pose hilare face à une sculpture en radicelle de petites perles enfilées dont nous connaîtrons assez vite l’origine
Avant de commencer notre lecture, la page de garde nous met justement... en garde : ceci est un livre de Nina Lechartier. Mais pourquoi écrire ça ? Sûrement pour nous avertir que cette fois-ci il ne sera pas question d’une compilation de récits mystérieux, d’épisodes à rallonge, mais bien d’une longue intrigue qui nous tiendra en haleine sur 192 pages.
Première page, dans une case vaguement carré, un type casquette/binocles à la barre, pêcheur de calamars, de saumon et de merlans, s’apprête à débarquer notre héros sur une minuscule île isolée. Ni inexplorée, ni sauvage, inconnue du monde entier, elle est tout simplement sans grand intérêt. Une flore anodine (supersauge des graviers et le pommier Bhârk aux fruits toxiques) et un clebs moche en guise de faune exotique. Alors que vient faire y faire notre petit blondinet au chapeau emplumé ?
Figurez vous qu’en 2014, le Comité Européen de Développement des Fonds liés à la Culture dans les Territoires Septentrionaux Isolés et Tristes, ayant été averti de l’absence totale d’initiative culturelle, a décidé d’y envoyer un artiste en résidence pour y créer un projet en lien avec les habitants et le territoire. Nous voilà donc rassurés, notre personnage principal est un artiste.
De lui, on ne connaîtra rien, pas même son nom. Le narrateur l’évoquera toujours sous le sobriquet de « notre héros ». Son genre d’art ? Un travail un brin conceptuel sur le passé et le souvenir. Ah oui, il utilise aussi plusieurs médias. Après une rapide visite guidée de l’île par son maire suspicieux, le voilà donc parti à la rencontre des habitants.
Nina Lechartier : « Je travaille le texte et les dessins en même temps, quand je fais des recherches préliminaires pour un projet. Je remplis de nombreux carnets avec des essais de noms, de têtes de personnages, des répliques que je les imagine dire, des morceaux de dialogue... Je mets aussi de la couleur dans mes carnets de recherche car la couleur est très importante pour la narration. J’aime que mes carnets soient jolis et rythmés pour que je puisse les relire facilement. Et tout ça se fait en même temps qu’une recherche sur la structure du récit. Je consomme beaucoup de films et de romans et je suis souvent marquée par des façons d’écrire le scénario.
J’aime bien les choses qui fonctionnent, les grosses ficelles, mais ce que je préfère c’est les réinterpréter. D’ailleurs il y a un site que je consulte souvent pour vérifier que je ne tombe pas dans des gros clichés ou que les intentions que j’ai pour raconter quelque chose sont suffisamment originales, c’est le site www.tvtropes.org. Ce site répertorie tous les « tropes » (les motifs narratifs qu’on trouve couramment dans la pop culture). C’est une mine d’or et ça permet de prendre conscience de ce qu’on écrit et de pourquoi on raconte telle chose de telle façon. Et en même temps j’essaie de ne pas tomber dans une vision trop entertainment à l’américaine de l’écriture où tout devrait être tout le temps efficace, c’est-à-dire que j’essaie de surprendre les lecteur.ices, de les déstabiliser, mais tout en leur plaisant parce que je fais ça avant tout pour être lue.
Après il y a des envies de décors ou de personnages, quand je les ressens je les note, et je travaille dessus pour essayer d’en faire quelque chose de concret, par exemple pour l’invité fantastique je me suis dit : « Je déteste les histoires nombrilistes sur des artistes qui ont des problèmes de création, tiens, et si j’essayais d’en faire une à ma sauce et voir ce que ca donne ? » Du coup j’ai cherché des solutions pour avoir ce personnage d’artiste et ne pas parler de problème d’ego et de travail.
Au final, ce personnage central est presque le moins intéressant du livre, il est totalement transparent, il sert juste à déclencher des mécanismes chez les autres. D’ailleurs, aucun de mes personnages n’est absolument intéressant. Ce sont les relations entre eux qui sont intéressantes, c’est des jeux de rapports, de contrastes, de dialogues, de choses inattendues qu’on apprend sur les relations entre eux. Les personnages ont beaucoup de trous aussi. Si ce n’est pas intéressant de savoir leur passé, on ne saura pas. Pareil pour leur nom, leur famille, leurs hobbys, etc. , on ne sait pas forcément. Ils n’ont pas d’existence en dehors des livres, ils existent juste par leur place dans le récit. Leur personnalités, leurs tics, ne préexistent pas à la construction du récit. Ils sont construits en même temps, en rapport, et je réécris beaucoup, je réagence beaucoup, je supprime des choses… »
À partir de là, le récit sera découpé en en chapitres, chacun correspondant à un entretien avec un résident de l’île. Madame Precious lui racontera une sombre histoire de cannibalisme, le muet Petrik, sculpteur à ses heures, sorte d’Othoniel de la morve, lui montrera son projet pour l’île, la jeune Lucile lui parlera de son évasion du Pays des Fleurs où toutes les personnes méchantes sont condamnées à mort, Jose Fairwick lui fera part de sa terrible malédiction, etc.
Toutes ces histoires, par leur côtés grotesques et extrêmes, sont évidemment inexploitables dans le cadre d’un projet artistique. Le réel, cet idiot, résiste dès qu’on l’interroge et ne veut rien lâcher. Voilà notre héros bien avancé… Mais ne vous inquiétez pas pour lui, il finira bien par trouver une idée. Quelle forme aura-t-elle ? Je vous laisse deviner. En tout cas, si quelqu’un peut faire des œuvres en de crottes de nez séchées, c’est fou ce que l’on peut faire avec des croûtes fraîches.
Nina Lechartier : « Ma Bible en littérature, c’est le Manuscrit trouvé à Saragosse de Jan Potocki, adapté aussi en film par Wojciech J. Has. C’est une histoire fantastique à tiroirs, vraiment drôle, avec des passage morbides, mais en carton-pâte et avec un héros idiot. C’est juste un livre super fun.
Ensuite, j’adore Marcel Proust, À La Recherche du Temps Perdu m’a beaucoup marquée. Déjà, c’est un espèce d’anti-héros qui parle de plein de choses de la vie dont je n’avais jamais entendu parler dans un livre, ça m’a énormément touchée. Ensuite, il écrit d’une manière délirante, comme personne d’autre. Je pourrais en parler des heures. Si il y a un truc que je retiens de lui, c’est les personnages qu’il crée : jamais totalement transparents, avec de multiples vies, sur lesquels Proust fait des révélations jusqu’à la fin de la saga. Ses personnages ne sont pas du tout des stéréotypes et il les aime sincèrement. Donc, ça m’a inspirée sur le fait de faire un truc comme personne d’autre, de parler de ce qu’on veut, beaucoup d’humour aussi, et pas de personnages stéréotypés.
Et sinon La Montagne Magique de Thomas Mann, parce que lui aussi il met des centaines de pages pour juste développer une idée, une situation. Il a expliqué dans une lettre que son roman devait être très court, et qu’en l’écrivant, il avait eu l’idée de situations humoristiques qui ont nécessité beaucoup de pages pour être développées. Je trouve ça génial de consacrer des pages et des pages à quelque chose de drôle ou pour juste surprendre, étonner les lectrices et les lecteurs. »
Bande dessinée-poupée russe, L’Invité fantastique est un emboîtement d’histoires où Nina Lechartier revisite des genres aussi divers que l’aventure, l’horreur, le policier, la science-fiction, le fantastique, la critique d’art... Chaque épisode de vie évoqué par un habitant se retrouve alors illustré, la parole y est toujours mise en images sauf à une occasion : lors d’ une confession, dont on ne connaîtra jamais le contenu, seule la description des attitudes du locuteur nous sera offerte en guise d’indices. Ici, le secret se transforme en mystère en passant par le nerf optique. Lechartier démontre ainsi la défaite de la langue (que tous les personnages ont bien pendues) face à l’œil (qui pend lui aussi entre les seins de Madame Precious), de l’oreille (qui écoute) face à la main (qui peint), en bref : l’art et ses affabulations l’emporteront toujours sur le réel et ses fictions. Fabuler avec des images, voilà l’art fantastique de la bande dessinée, le véritable invité de cet ouvrage savoureux.
Nina Lechartier : « La structure de "L’invité fantastique" vient à mon avis directement du ""Manuscrit trouvé à Saragosse que je crois avoir lu dans ma phase de recherche. Je voulais piquer plein de trucs dans ce livre et j’ai donc réfléchi à ce qui était faisable, à ma mesure, autour d’un récit à tiroir. Ensuite, à l’époque, je rêvais de faire une résidence. J’étais sortie de l’école, j’avais un travail salarié et pas vraiment de perspectives artistiques. Les résidences me faisaient rêver. Elles me semblaient être le truc par excellence que font les pros. J’ai postulé à plein d’entre elles mais je n’ai jamais été prise. Je regardais les intitulés, les photos, et le travail attendu et au bout d’un moment je pense que ça a infusé et j’ai noté sur un carnet la phrase « Un artiste fait une résidence et rien ne se passe comme prévu » et je suis restée là-dessus et j’ai travaillé à partir de ça.
Par la suite, il est bien de préciser que j’ai vraiment eu une bourse pour réaliser ce projet, grâce aux Ateliers Médicis, donc j’ai pu arrêter le travail salarié, prendre un atelier et me concentrer à fond sur mon projet. Je devais aussi intervenir dans une école. Mais ce contexte-là n’a pas influencé mon histoire, elle était déjà à moitié écrite, et en plus, je ne fais pas du tout des histoires en réaction immédiate à ce qui se passe autour de moi. Mes recherches sont dans un temps long, je mets des expériences de vie dans mes récits, mais je mets des années à digérer un truc qui m’arrive donc la connexion ne peut pas être directe. Ce n’est pas un livre sur les résidences, mais plutôt sur comment j’imaginais que ça pouvait se passer à un moment quand je n’en avais pas fait. »
Nina Lechartier : « Pendant la Covid (en gros 2020-2021), j’ai fait une autre bande dessinée. Je ne sais pas quand nous allons la sortir avec Magnani. L’année prochaine, j’espère. C’est sur un carnaval : il y a une sorcière, un philtre d’amour, des complotistes, un extraterrestre, plein de retournements de situation, une ville où tous les habitants sont endormis... Je ne veux pas trop en parler parce que j’ai besoin de la peaufiner encore un peu. C’était très dur de faire une histoire pendant la pandémie parce que j’étais complètement déconnectée des autres gens, du milieu artistique, de mes amis. J’étais un peu en roue libre et je suis partie dans une histoire un peu gratuite...Maintenant, j’ai un peu plus les pieds sur terre donc je vais la remanier un peu avant qu’elle sorte pour qu’elle soit plus cohérente et mieux rythmée.
Pour mon projet suivant, j’aimerais repartir sur quelque chose de plus moderne, de plus expérimental, de plus aléatoire, tout en ayant une histoire plaisante et accessible. Mais en poussant juste d’un cran le niveau d’exigence, et refaire des matières, des textures, des choses un peu plus bancales.
Et sinon, à côté de la BD, je fais aussi des peintures sans narration où je me permets plus de choses au niveau pictural. Mais je pense qu’elles sont assez marrantes aussi. Pour l’instant, je n’ai pas trop d’occasion de les montrer. Mais ça viendra peut-être un jour. En attendant, je fais des tirages et je les diffuse sur des salons de micro-édition. »
Voir en ligne : Le site des éditions Magnani
(par Thomas BERNARD)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Retrouvez Nina Lechartier sur Instagram > www.instagram.com/ninalechartier/
Thelma Susbielle a déjà parlé d’Un Soir de Fête, ici
En médaillon : Un concours de circonstance nous a fait mettre une mauvaise photo de l’autrice. Nous corrigeons aussitôt.
Participez à la discussion