La Costa Brava espagnole est connue de tous comme une terre idyllique du grand tourisme international. Avec ses belles plages et ses paysages somptueux, mais aussi ses extraterrestres, ses disparitions inquiétantes et ses rencontres surnaturelles. Détrompez-vous, loin des grands panneaux publicitaires, ou plutôt derrière, cette région de la Méditerranée est depuis des décennies un haut-lieu des événements dit du “troisième type”.
Loin d’être des anecdotes inaperçues, nombreux artistes du 9e art ont basé leurs récits dans cette géographie singulière de la nation ibérique. On pourrait même dire que les éditions Autsaiders, basées à Majorque en tirent leurs fonds de commerce de cette mythologie moderne et que le succès de l’étoile montante des lettres espagnoles, Anabel Colazo, en est dû à ses deux premiers albums puisant des récits populaires de la région.
Dans son opéra prima, l’auteur argentin basé au Mexique, Dr. Alderete, nous propose de découvrir cette ville qu’on aurait cru sortie de Twin Peaks en construisant, sous forme de mosaïque, le récit de l’album. Celui-ci s’articule par la mise en relation d’histoires, dressant le portrait fragmenté d’une ville inquiétante, en proie à une malédiction qui ne dit pas son nom.
Dans un décor tiré de l’univers d’Hitchcock, on suit en alternance des chapitres traités en couleurs, des passages en noir et blanc mettant en scène un mystérieux personnage anonyme, répétant un parcours quasi rituel entre la ville et la zone marécageuse qui la borde, puis en filigrane, on découvre toute sorte d’histoires dantesques, dignes de The Twilight Zone (La Quatrième Dimension).
Jouant sur un ton semi-réel entre le documentaire et la fiction paranoïaque, l’auteur confond les dates et les lieux, lui permettant de poser un univers d’une grande richesse, suintant mystère et séduction. D’autant plus que les nombreuses références cinématographiques nous permettant de relier le village reculé d’Olot avec un monde presque familier, aux interstices de la réalité.
Doté d’un graphisme prenant, renforcé par son trait clair et épais, Dr. Alderete élabore des compositions réminiscences des affiches de cinéma de série B, ou encore des pochettes psychédéliques des années 70. Avec ce premier album, il était question d’atteindre un objectif relativement facile à suivre : nous interroger par rapport à notre relation avec la “vérité” consensuelle, celle que l’on tisse par-dessous la table entre communautés.
L’album n’en reste pas moins une pièce à méditation, riche en double (et triple) sens, et marque l’entrée avec les pieds bien posés de cet illustrateur vétéran, dans le royaume du 9e art.
On entendra certainement parler de lui dans les années à venir…
(par Jorge Sanchez)
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Olot - Par Dr. Alderete, traduit de l’espagnol par Fabien Thévenot. Éditions Tanibis. 120 pages - 20€.
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