Batman Dark City T. 3 : Gotham War - Par Joshua Williamson & Chip Zdarsky - Jorge Jimenez & Guillem March & Collectif - Urban Comics

Ce troisième pavé de Batman Dark City se décompose en deux parties distinctes : un point de relais avec la trame de Joshua Williamson sur Justice League Knight Terrors et les actions de la guilde constituée autour de Catwoman.

Les premiers chapitres reviennent donc sur ce nouveau personnage emblématique qu’est Insomnia. Héros comme vilains sont plongés dans un sommeil éternel suite à l’intervention d’Insomnia, continuellement en quête de la Pierre des cauchemars.

Emprisonné dans un dédale de rêves obscurs, Batman affronte une fois encore son destin. D’abord là où tout a commencé : à Crime Alley, lors du meurtre de ses parents, puis au cinéma Monarch, dernier instant de bonheur partagé avec eux, avant d’être projeté vers d’autres territoires de son esprit manipulé par le pouvoir toxique d’Insomnia.

De manière complexe mais fluide, le scénariste questionne le lecteur sur les raisons et motivations du Chevalier noir a vouloir dépasser à chaque fois ses démons intérieurs. Dans Justice League Knights Terrors, Joshua Williamson intronisait le personnage d’Insomnia, cet être perfide capable de plonger l’Humanité dans des songes manipulés. L’auteur revient sur ce concept dévoilant un Batman à l’agonie perdu dans ses cauchemars, dont même la chauve-souris, conçue comme une entité à part, s’extrait de son organisme, désireuse de vivre sa propre existence et de lui donner du fil à retordre.

Par ailleurs, le corps du Chevalier noir est contrôlé par Deadman dans le monde réel, parasitant son esprit. Dès lors, Batman est en quête d’un choc suffisamment violent afin de le libérer de cette emprise. Sa rencontre avec son double, le jeune Bruce Wayne pleurant la mort de ses parents lui sera bénéfique et révélateur.

Joshua Williamson concocte ici une trame qui captive d’emblée grâce notamment à une succession rapide de séquences courtes et à des interconnections habiles entre les différents protagonistes. La tension s’accentue au fil des chapitres de quoi tenir le lectorat en haleine sans difficulté. De manière générale, l’ensemble se veut habilement soigné et haletant mais, à plus d’un moment, on se sent littéralement perdu entre rêves et réalité, dans les dédales du passé comme dans le présent.

Pour la suite de ce recueil, nous avons droit essentiellement à l’intervention de Chip Zdarsky, qui œuvre sur la quasi totalité des chapitres, bien que secondé par Matthew Rosenberg & Tiny Howard.

©Jorge Gimenez / Urban Comics

En 84 ans de bons et loyaux services, le personnage de Batman s’est vu confié de nombreux avatars en fonction de la créativité de ses auteurs. Chip Zdarsky exploite soigneusement ce concept par le biais de Batmen multiples. Grâce à l’aventure multiverselle, les dérivés du héros jouent un rôle prépondérant mais suscitent par la même occasion de nouvelles interrogations.

Le précédent cycle de Batman Dark City nous faisait découvrir un Batman à la psyché instable ayant contribué à semer le virus de Zur-en-Arrh dans l’esprit de ses doubles. Dorénavant, Chip Zdarsky s’attèle à une autre forme de développement : celui d’une famille super-héroïque en crise et d’un Batman entravé par le Multivers, sous l’influence de Zur-en-Arrh.

D’innombrables protagonistes participent à cette aventure dont certains marquent davantage les esprits. C’est le cas entre autres des jumeaux Cobblepot qui incarnent à merveille la sournoiserie de leur paternel. Entre Selina et Bruce Wayne, la distance semble plus que jamais de saison et les secrets dissimulés entravent le peu de confiance qu’il leur restent.

La Reine des cambrioleuses, que l’on retrouve d’ailleurs aux premières loges dans cet épisode se concentre à former une association de voyous à son service afin d’éradiquer la criminalité ambiante à Gotham.

Dans les premiers chapitres de ce récit, la partie graphique est assurée par Guillem March qui a collaboré sur la trilogie Joker War ainsi que pour Joker Infinite. La suite de l’album est mis en valeur par Belén Ortega dans un style qui convient parfaitement à cette histoire sombre et rocambolesque. Le talentueux Jorge Jimenez prend ensuite le relais avec un dessin juste toujours au rendez-vous.

En comparaison, le trait ingénieux de Guillem March permet de plonger immédiatement dans cette trame débordante. Un découpage efficace, des prises de vue splendides s’ordonnent idéalement.

Certains dessinateurs, comme
David Lafuente et Mike Hawthorne manquent clairement à l’appel. Il faut dire que le style s’acccorde peu à celui de ses collègues. Leur trait enfantin, désarticulé et à cent lieues du travail complexe et puissant de Guillem March ou de Jorge Jimenez.

©Guillem March / Urban Comics