Un grand livre pour le Petit Nicolas

Et des jours heureux, il est bien question ici. L’album s’ouvre, c’est un peu surprenant mais en même temps c’est une belle idée, sur l’enfance des auteurs. On voit des photos où ils sont bambins. Goscinny, on connaissait un peu, mais Sempé, en petit communiant, c’est mimi tout plein. Et quand on voit René Goscinny en culottes courtes, on comprend d’où viennent celles du Petit Nicolas.

On passe aux photos de classe, aux souvenirs de vacances, aux lectures de jeunesse : Tarzan, Blanche Neige, Zig & Puce… Et puis aux premiers dessins. Car Goscinny dessinait plutôt bien, le saviez-vous ? Il voulait être dessinateur. Mais il a rencontré des génies comme Morris, Franquin ou Sempé et il a dû se dire que la barre était un peu haute, quand même.

Les premiers dessins de Sempé pour Le Rire ou France Dimanche en revanche tiennent très bien debout. Ils sont dans la lignée de Chaval et d’autres dessinateurs d’humour de son temps, mais il retrouve très vite sa petite musique faite de touches légères, timides pourrait-on dire, jazzy aussi.

Et puis les deux hommes tracent leur chemin. « L’Américain » et le Bordelais se lient d’amitié à Paris. C’est la rencontre entre deux chouettes copains qui vont se faire publier en… Belgique, dans un journal appelé Le Moustique.

Le Petit Nicolas est… belge !

Et c’est là que naît Le Petit Nicolas, à Marcinelle sur les presses des éditions Dupuis, mais pas tout de suite. Il y a d’abord quelques dessins où il apparaît, des dessins d’humour, mais sans nom n’apparaît pas. C’est officiellement le 18 Septembre 1955 que deux gags annoncent son arrivée. Goscinny signe « Agostini ». La BD sort la semaine suivante, en deux, puis en quatre couleurs quelques numéros plus tard. Toutes les pages sont reproduites dans ce grand album, c’est magnifique. Le Petit Nicolas devient le Family Strip de Moustique et on va le voir sur plusieurs couvertures du journal TV-radio des éditions Dupuis.

Mais ça s’arrête brusquement car Goscinny est viré par le World Press, fournisseur de Dupuis, pour syndicalisme aggravé. Il avait des prétentions d’auteur, l’infâme scénariste. Pour un peu il lui viendrait la prétention d’être calife à la place de l’éditeur ! Sempé est solidaire et quitte la World à son tour, et même et un peu soulagé, il est vrai : le rythme de la BD ne lui convenait guère : il préfère celui de l’illustration et du dessin d’humour. Les deux comparses vont se retrouver à la création du Journal Pilote -fondé par Goscinny, Uderzo et Charlier- et, un peu auparavant, dans le supplément dominical de Sud Ouest. Ce ne sont plus des BD mais de petits contes qui, réunis en volumes, feront le tour du monde.

Son prochain dessin animé « Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux » sort en salle dans deux jours, le 12 octobre 2022. Et nous sommes déjà heureux avec ce beau livre !