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Zone de crise par Simon Hanselmann : « la première grande oeuvre sur la pandémie »

Par Marlene AGIUS le 9 avril 2022                      Lien  
Un chat complotiste, une sorcière défoncée, un hibou inhibé, un loup-garou sodomite : voici les protagonistes, chaotiques et superbes bien connus des fans de Simon Hanselmann, dans "Zone de Crise" - écrit sur et pendant l'année du confinement. Préparez-vous à vous moquer de la condition humaine avec des personnages pas très humains.

Si pendant le confinement vous êtes devenus accro à Animal Crossing, avez fait un stock de PQ, ou que vous avez commencé à mesurer le temps en canettes de bières, c’est peut-être que vous êtes un personnage de Zone de Crise de Simon Hanselmann.

Il se peut aussi que, bloqué déjà depuis un mois dans votre salon à l’abri du virus, vous ayez procrastiné votre télétravail en lisant sa BD-feuilleton sur Instagram. Peut-être même que vous aviez voté pour le webcomic lors de sa nomination aux Eisner Awards puis été profondément ému en apprenant sa victoire, en repensant à toutes ces fois où ses strips quotidiens vous ont permis de fuir la réalité entre deux émissions de TV.

Zone de crise par Simon Hanselmann : « la première grande oeuvre sur la pandémie »
Zone de Crise - Simon Hanselmann © Dupuis/Seuil

Du 13 mars au 22 décembre 2020, Hanselmann entreprit lui aussi de procrastiner un nouveau tome sa série, Megg’s Coven, et créa un contenu de quelques cases par jour qu’il partagea gratuitement sur Instagram, riche de ses 100 000 abonnés. Zone de Crise n’était censé être qu’un fanzine de quelques pages publié à la fin d’un confinement estimé à quelques semaines.

Zone de Crise - Simon Hanselmann © Dupuis/Seuil

« Les zines ne constituaient plus un gagne-pain viable. Alors comment partager mes productions grivoises avec les masses affamées ? Le temps était venu pour moi de faire un webcomic. J’avais résisté à cette pratique détestable depuis des années », écrit l’auteur. Il eut alors l’idée de dessiner deux cases « secrètes » par planche qui deviendraient un bonus pour les futurs acheteurs de l’objet physique.
Des mois de confinement, 300 pages et un Eisner plus tard, Simon Hanselmann publia son album chez Fantagraphics.

Crisis Zone - Simon Hanselmann © Fantagraphics

Auteur australien vivant à Seattle, Hanselmann avait débuté sa série Megg, Mogg & Owl dès 2013, tournant en dérision les célèbres protagonistes de la série anglaise de livres pour enfants des années 1970 Meg and Mog. Dérision reste un faible mot pour décrire certains épisodes de tuerie scatologique ; profane serait plus adéquat. C’est cette profanité qu’il lui a valut le Fauve de la meilleure série à Angoulême, en 2018, et plusieurs nominations aux Ignatz.

Zone de Crise - Simon Hanselmann © Dupuis/Seuil

Si 2020 était un livre, ce serait Zone de Crise. Subtil mélange de crises d’angoisse, de cocaïne et de pornographie, le New York Times l’appelle « la première grande œuvre sur la pandémie ». Vous y verrez Mogg qui se défonce la gueule à coup de désinfectant pour mains, Megg qui fuit dans les jeux vidéo, Werewolf Jones qui accède à la célébrité sur Youtube, TikTok et Netflix, et Owl qui surmonte sa placidité pour reprendre le contrôle de sa maison détruite. Tout ça sur le fond politique d’une Amérique trumpiste face aux émeutes antifas.

En postface, l’auteur de 40 ans procède à une explication de chaque planche à visée carrément encyclopédique, détaillant jour après jour le calendrier de la débauche. 500 panels dans un « Director’s Commentary » par le d’Alembert de la crasse.

Zone de Crise - Simon Hanselmann © Dupuis/Seuil

C’est clair, pour faire un bon album de Megg & Mogg, il faut une bonne dose de burlesque associée à une perte de foi certaine en l’humanité. Certains grands noms d’Hollywood avaient d’ailleurs essayé d’en récupérer les droits pour une adaptation à l’écran bien plus politiquement correct. Les aventures de Megg, Mogg, Owl et Werewolf Jones continueront donc sur papier dans les années à venir. C’est le destin provisoire d’une série qui ne cesse d’être la chronique horripilante « de nos vies à tous ».

(par Marlene AGIUS)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782021509069

Dupuis à partir de 13 ans Humour Etats-Unis 🏆 Prix Eisner 🏆 Prix Ignatz
 
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3 Messages :
  • Aussi pertinent soit Hanselmann sur cette pandémie, il a quand même lâché son éditeur français historique qui le défendait depuis des années, Misma, qui l’a fait connaître au public francophone avec un grand soin apporté à ses éditions successives, pour passer au Seuil/Dupuis, tout ça pour toucher un peu plus de droits sur la cession Fantagraphics.

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    • Répondu le 9 avril 2022 à  11:06 :

      Ben il a peut-être envie de mieux gagner sa vie ? C’est un pêché ? Les footballeurs font ça aussi, changer d’équipe pour avoir un meilleur contrat.

      Répondre à ce message

    • Répondu le 9 avril 2022 à  14:15 :

      « Les lecteurs aux yeux de lynx n’auront pas manqué de remarquer que l’édition française se fait chez Dupuis au lieu des traditionnelles éditions Misma, ce fut l’une des décisions les plus difficiles de ma carrière professionnelle. Misma a été l’un de mes tout premiers éditeurs et a toujours été une maison fantastique. Cependant, avec un bébé en route, je ne pouvais décliner l’avance plus conséquente et la distribution plus vaste que m’offraient les éditions Dupuis. La décision n’a pas été facile à prendre. Damien et Guillaume, je vous adore et je suis désolé… » en postface

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