Comment est née cette série ?
Jean Dufaux souhaitait écrire une histoire sur les harems. Il voulait traiter ce thème avec un autre angle de vue que celui de notre vision occidentale. Jean pensait qu’une dessinatrice serait plus adaptée pour illustrer cet univers particulièrement féminin. Il m’a donc proposé de collaborer avec lui… En fait, je crois que ma série Eva Medusa l’a confirmé dans ses choix.
C’est un sujet délicat car nous peuvions facilement aborder des clichés malvenus si nous n’y prenions pas garde !
Vous n’aviez pas d’appréhension à aborder cette thématique ?
Pour être honnête, oui ! (Rires). D’autant plus que nous ne savions pas où nous allions. Jean aime avoir la liberté de laisser son histoire prendre un autre tournant au fur et à mesure des pérégrinations de ses personnages. Il m’a bien sûr dévoilé une partie de l’intrigue du récit et certains axes importants avant de travailler ensemble. Le résultat final du premier cycle diffère cependant quelque peu du projet initial… Mais j’ai rapidement été rassuré en lisant les découpages de Jean !
Qu’appréciez-vous dans l’écriture de Dufaux ?
Sa subtilité ! Et puis, ses scénarios contiennent de grandes zones d’ombre. Cette ouverture est utile : elle suscite un questionnement et une réflexion pour le lecteur…
Dans votre précédente série, « A la Recherche de la Licorne », vous aviez adopté un style graphique proche de celui de Willy Vandersteen au début de sa carrière…
Je suis espagnole, et je ne connais pas ce dessinateur. J’ai surtout recherché à exploiter mes influences de la peinture flamande du dix-huitième siècle. D’autant plus que ce récit se déroulait à la même époque. En fait, je voulais réaliser une « bande dessinée à l’ancienne » qui ressemble à ce type de tableau. J’étais dans une recherche de style pour être la plus esthétique possible… Il y a d’ailleurs une évolution flagrante entre le premier et le dernier album de ce triptyque.
Aujourd’hui encore, on sent que vous êtes dans cette recherche ?
Oui. J’ai envie de me surpasser d’album en album et d’essayer de nouvelles choses. J’ai beaucoup évolué en travaillant sur Djinn, notamment dans ma manière de percevoir les ambiances et les décors. J’essaie d’accorder une grande importance à ces derniers. C’est l’un des moyens pour placer une époque dans le récit.
Comment vivez-vous le succès de cette série ?
Cela me fait plaisir. Je suis surprise de constater que Djinn est rentré dans l’imaginaire des lecteurs. Ils se sont appropriés l’histoire. Lorsque je les rencontre, ils me racontent souvent des éléments de leurs vies qui peuvent être raccrochés à Djinn. Que cela soit un tatouage ou autre chose …
Pourquoi avoir situé le deuxième cycle en Afrique ?
Jean m’a surpris ! Après avoir réalisé un cycle se déroulant dans le monde ottoman, il souhaitait faire voyager les personnages. Nous aimons tous les deux l’Afrique noire. Et représenter ce continent constituait un défi graphique. Les tons changent. Ces nouvelles ambiances ont influencé mon cadrage. Ce cycle comptera quatre albums. Le suivant se déroulera aux Indes.
Quels sont vos projets ?
Je travaille sur le septième album qui sortira en octobre 2007. Je réaliserai également un one-shot avec Emilio Ruiz, le scénariste de A la Recherche de la Licorne. Il s’agira d’une histoire contemporaine où nous aborderons des tranches de vie de différents personnages. Cet album, conceptuel, contiendra beaucoup d’humour …
(par Nicolas Anspach)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Lire la chronique du de Djinn T6 : "La Perle Noire"
Photo de l’auteur (c) Laurent Boileau
Illustrations (c) Mirallès, Dufaux & Dargaud.