Sprague - Par Rodolphe & Roman - Daniel Maghen

Les planètes recouvertes de sable sont presque devenues des classiques du genre : Mad Max, Arrakis dans Dune, Tatouine dans Star Wars... Mais dans cette histoire-ci, pas de vaisseaux spatiaux ou d’engins à moteur. La mer s’est retirée progressivement depuis des mois, et avec elle, la deuxième lune a disparu. Des phénomènes inexpliqués s’enchaînent, sans explication.

Dans le village de Goëm, dans la baie de Sprague, qui n’a plus de baie que le nom, on désespère de cette situation. Toutes les activités du village : pêche, culture et élevage,... sont mis en péril. Après avoir déjà envoyé plusieurs expéditions à travers le désert à la recherche de points d’eau, celles-ci n’étant jamais revenues, le désespoir gagne les villageois.

Excepté deux frères. Niels et Vivian sont prêts à prendre le risque de s’aventure à leur tour dans l’étendue de sable. Mais pour cela, il leur faut un capitaine et un navire. Sur le rafiot à roues du Capitaine O’Greg, ils se lancent dans une quête dont ils ne connaissent pas l’issue. Que sont devenus les deux expéditions qui les ont précédés ? Vont-ils réussir à retrouver l’océan ? Quel lien y-at-il entre la disparition de l’astre nocturne et l’étendue marine ? Les frères retrouveront-ils les femmes qui hantent leurs nuits ? Des interrogations qui trouveront leur résolution à la fin de l’album.

Délaissant un moment son habituel binôme Léo, Rodolphe continue de dérouler une œuvre riche et captivante. Après les séries Kenya, Namibia (Dargaud) et Centaurus (Delcourt) et le récent Iruene (Daniel Maghen)Daniel-Maghen, le scénariste à l’imagination fertile propose ici un one-shot efficace : différentes trames s’entrelacent, entre aventure, mystère et romance. Le scénario a été écrit spécialement pour le dessinateur, Olivier Roman. L’univers visuel créé par celui-ci s’y révèle en parfaite adéquation.

Dans ce monde légèrement différent du nôtre, des cerfs-volants permettent de grimper vers le ciel, preuve d’une pesanteur différente de celle que nous connaissons. L’esthétique proposée par Roman puise dans de multiples références pour l’architecture et l’habillement, entre le médiéval, l’oriental et l’asiatique. Sans oublier l’apport d’un aspect plus futuriste, notamment avec le perroquet parlant et à l’œil mécanique.

Le trait minutieux de Roman offre de magnifiques décors et paysages ultra détaillés, passant de la contemplation à l’action en passant par des moments plus réflexifs sans jamais pêcher.

La mise en couleur de Denis Béchu est tout simplement sublime et participe en grande partie à la grande qualité de l’album. Le coloriste du récent album de Boucq et Charyn New-York Cannibals démontre une fois de plus d’un talent unique pour offrir des colorisations exigeantes et stupéfiantes. Des couchers de soleil aux nuits étoilées dans le désert, la gamme chromatique dans les tons ocre réchauffe l’album et le lecteur avec lui.

Cette bande dessinée saura satisfaire les fans de SF low-tech et d’univers alternatifs ainsi que les amateurs de belles planches.